Portrait de Fabian Gastellier
Image, G.AdC
« ― Fermez les rideaux, demanda la femme, je ne veux pas voir cette lumière.
L'homme s'exécuta, voilant la pièce d'une nuit artificielle. Il alluma l'une des lampes, les mêmes que dans sa chambre à elle, également disposées sur deux tables de chevet. Tout ressemblait d'ailleurs à sa chambre, à part la couleur des murs, verts chez elle, bleus ici. Le lit avait été préparé avec soin pour la nuit, le drap de lin replié en triangle sur la courtepointe et le couvre-lit rangé sur l'un des fauteuils. Aucun objet personnel ne traînait, pas le moindre vêtement ni le moindre paquet de cigarettes. Une pièce inhabitée.
Elle est seule, face à l'homme, comme jadis, face à qui? Elle n'a pas peur, son corps ne ressent rien, même plus la douleur. Elle ne voit pas, ses yeux bleus sont devenus de plus en plus blancs de trop de larmes versées. Elle nage en dehors d'elle-même et, se cherchant, rencontre l'étranger. Elle le regarde à peine, inutile, elle connaît l'attitude qu'ils prennent tous à cette heure, un sursaut d'arrogance, et le visage qu'ils ont, hautain, avec des yeux brillants, des yeux d'orage. Après, poussière. »
Fabian Gastellier, L'Hôtel, Éditions Stock, 1993, page 120.
Retour au Sommaire de la galerie