<< Deux poèmes d'un jour, écrits au cours du premier confinement à partir d'une toile acrylique de Lydia Padellec, alias LaOdina.
Acrylique de → LaOdina
Elle à sa fenêtre
absorbe la lumière
soleil et ombre
joie des oiseaux
brise émouvante
ce qui frémit dans le silence
s’infiltre et glisse
draine ses pores irrigue les veines
et se glisse sous la peau
nue
Elle à sa fenêtre
verdoie comme feuille
éblouie de vent
se nourrit de sève
racines et ramilles
la couvrent
les lianes volubiles s’entorsadent
s’envolutent et la bercent
nue
Elle à sa fenêtre
se fond en souple nature
harmonie se déploie
vaste éventail
qui efface et dehors et dedans
tout se tient se parachève et danse
se déplace dans l’indolence
les seuils s’effacent
univers un
et nu.
Angèle Paoli "Elle à sa fenêtre" in Fenêtres sur jardin, 27 poètes, Anthologie initiée et dirigée par Lydia Padellec, d'après les peintures de LaOdina,
Editions La lune bleue - Trouées poétiques
***
XVI
Elle, à sa fenêtre. Nue.
S’absorbe yeux baissés
sur son corps. Nu.
Sereine, calme, un peu triste
elle observe sa métamorphose.
Lente, précise, imprévue.
La transformation est là
qui s’opère à son insu. Elle la sent
qui verse en elle un sang nouveau,
la consume pour la faire croître.
Croître et verdir.
Promesse de floraison éclatante.
Éclatante et printanière.
Elle, à sa fenêtre. Respire.
L’air de la mer chargé d’embruns,
l’air des feuillages drossés par le vent.
Chênes et arbousiers, asphodèles en fleurs
ellébores ivoire, anémones sauvages
cyclamens frileux encore,
et les tendres violettes.
Plantes et fleurs courent à elle,
tendent leurs corolles douces,
mêlent couleurs et parfums
aux pousses sauvages des talus.
Nombrils de vénus et aristoloches,
mousses et fougères millénaires
aux feuilles ouvragées de spores bruns.
Elle, à sa fenêtre.
S’enivre du chant des oiseaux.
Un tuit tuit tuit transperce le feuillage,
secoue les jeunes bourgeons.
Un chardonneret sans doute.
Il appelle. tuit tuit tuit.
Sa compagne, sans doute.
Il perçoit le mouvement.
D’elle, à sa fenêtre.
Il s’élance,
passe devant la fenêtre ouverte,
strie l’air de ses ailes agiles,
file se perdre dans un autre feuillage.
En un temps éclair, elle,
à sa fenêtre, droite et nue,
se penche.
Sa peau a verdi, les feuilles tissent
son corps blanc.
Feuilles de châtaigniers,
odorantes et brunes.
Des racines ont poussé
le long de ses membres-lianes,
des baies de salsepareilles
picotent sa peau, sèment des pois rouges
dans son dos, épaules pointillées
de pastilles rondes.
Daphnée à se fenêtre rêve.
D’un passé où elle était
nue.
Angèle Paoli, poème publié en 2021 dans Traverses, Éditions du Loup bleu, Les Lieux-Dits.
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A N G È L E P A O L I
Portrait par → Guidu Antonietti di Cinarca
VOIR → une brève bio d'Angèle
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