[JE TIRE ICI LES FILS DU MOT]
Je tire ici les fils
du mot
je halète sous le poids des ombres
je me sauve sur des allées peu fréquentées
où je peux compter mes pas
d’après une formule prédéterminée
soigneusement calculée
pour l’accomplissement exact des désirs
restés tabous pour moi
les seuls qui me restent
je tresse la lumière autour des balustrades métalliques
qui descendent jusqu’au lac
je vois le filigrane d’une nuit
de sexe, alcool et vitesse
restée dans mon passé à côté
du kilo de bijoux en or arabe
travaillés de sueur et de sang mélangé au pétrole
je souffre encore du trauma des symbolistes
desquels j’ai appris à regarder ma propre vie
comme une charade
je tresse les fils des mots dans un exercice
d’abstinence or sexe et alcool
la vitesse reste constante
Eliza Macadan, « Le printemps finit à l’Est », Lettre de Bucarest, éditions La Passe du vent, Collection Poésie, 2020, page 41.

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