[QU’IMPORTE LE TEMPS]
qu’importe le temps si je crée mon lieu
les mois les années sont des ruines
que mes mots déblaient
avec ces maîtres qui font mon destin
avec le présent de ma voix comme espoir
je ne regrette plus mes prières d’enfant
et m’adresse ici
à vous mes lecteurs
mes amis mon avenir
ô murs de ma maison !
de ruines en ruines
j’édifierai mon lieu
mes murs comme des mots
mes mots comme des murs
sans souvenir l’émotion retrouvée
pour des ruines nouvelles
et regardant l’avenir
j’édifierai l’espoir
qui sous les rêves bat
sans crainte de l’échec mais triomphe du désir
et fuite de la fin
quand seul vaut le procès
j’avancerai
et si sans émotion
je soulevais tous les cœurs
miracle des mots sans la vie
quand guérira cet automne malade
où pourrissent les pétales de l’été ?
l’air est lourd de souvenirs
mais j’ai tué le passé
et la maison blanche est à vendre
qui alors se souviendra
du fou du village et des rêves de l’enfance
si je n’y reviens pas ?
France Burghelle Rey, «III - L’Automne bleu », Lieu en trois temps suivi de L’un contre l’autre : Gegenüber, Poésie, éditions Unicité, 91530 Saint-Chéron, 2020, pp. 129-131.
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