L’ÂGE DU FRAGMENT
(extrait)
J’entre dans l’âge du fragment. Les choses se serrent, éclatent : esquilles, fibrilles, sang sur les doigts. Et la neige, toujours.
[…]
Dans l’image on n’entre pas. Elle reste en face, comme posée devant les yeux qui lui donnent ses limites et sa profondeur. La beauté est cette distance infranchissable tissée de lumière et de vols qu’on croit toujours pouvoir franchir. La main se tend, la bouche s’ouvre. On touche le murmure.
C’est un bruissement à peine. Une sorte de vibration fixe venue de là-haut ou d’en bas, on ne sait pas. Avec un ciel de craie et des visages noirs à contre-jour. Et des cris soudain, des rires. Et des phrases qui s’en vont, qu’on n’a pas su comprendre. Ou qu’on a mal entendues. Ou qu’on a oubliées, déjà. Seul est resté le silence et, très loin, comme au bord, ce qui ne se tait pas.
Ce qui ne se tait pas ou ce qui se tait, c’est pareil. Puisqu’on n’entend rien que le silence de la voix.
Jacques Ancet, « II L’âge du fragment », La Vie, malgré, chroniques, éditions Lettres Vives, Collection entre 4 yeux, 20213 Castellare-di-Casinca, 2020, pp. 17, 19, 20.
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