Écoute, tout ce que tu peux espérer maintenant, c’est que les choses lèvent un peu, de temps à autre, qu’elles se dressent, quittent un instant leur terre et puis se posent de nouveau : une illusion, certainement, si tangible pourtant les quelques secondes qu’elle règne ! Avec un brin de chance et vu ton âge, à moins de quelque accident, cela devrait encore durer vingt ans, peut-être trente. Et puis tu tireras ta révérence, du mieux qu’il te sera donné — on choisit rarement sa fin. Tu signerais ces lignes si tu le devais, je le crois. Tu ne saurais juste pas trop où poser ton nom. À moins de la feuille transparente qui vole en toi et que tu ne pourras jamais saisir. Je ne t’en dirai pas plus, ne m’en veux pas, regarde plutôt : la porte, le couloir, les escaliers, une autre porte, la rue, des rues, la sortie de la ville, la route, la campagne, d’autres villes, d’autres pays : tu es, nous sommes toujours partout entre les mains du mystère le plus pur.
Rien n’y fera
Toujours
la même
éternelle
absence
Mais de quoi ?
Dans quel sens
court-elle
La route ?
Que fera-t-elle
quand elle sera
au bout ?
Franck André Jamme, Bois de lune, Fata Morgana, 1990, pp. 57-59-60. Gravures de Richard Texier.
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