Mutsuo TAKAHASHI, Printemps florentin, choix de poèmes,
Presses Sorbonne Nouvelle, Cahiers de poésie bilingue 8, 2020.
Traduit du japonais par Bruno Smolarz.
Préface de Bruno Smolarz.
Lecture de Philippe Leuckx
Voilà une anthologie bilingue, avec des poèmes inédits en français. L’auteur, né en 1937, dont la vocation poétique s’est dessinée « très très tôt », vient de Kyüshü, la « plus méridionale des quatre grandes îles de l’archipel japonais ».
Sensible à l'altérité, au mystère du monde, aux lumières très fortes du sud, ce poète aime multiplier les expériences de découverte, dont celle du monde florentin qui donne son titre au livre Printemps florentin, et propose au lecteur une entrée pleine dans ce monde de l’écriture, cet « espace d’écriture » pour écrire, comme il le dit, le monde de la beauté.
Sans doute laisse-t-il, çà et là, affleurer la peine d’avoir été l’enfant « sans amour », « tombé dans un puits obscur », sans cesse en quête de « lumière en [s]oi ».
Ainsi se dessine cette première tranche du livre, sorte d’« Invitation à la poésie », qui retrace des moments de « l’enfant mort » à ce « sang voyageur », puisque là, nous sommes, lecteurs, auteur, aux « sources anciennes », « sous la peau du temps ».
Printemps florentin assume l’infléchissement d’une poésie qui honore la beauté, « trop lumineuse », traversant des œuvres, haussant des noms (Savonarole, Leonardo, Dante, Botticelli...) au statut noble de pauses obligées des voyages.
Sous le poète, « marcheur nocturne », esthète diurne, semble se glisser une nouvelle personnalité à la lumière et à l’aune des œuvres frôlées : dire addio à Florence sera difficile, sachant que « [p]our bien connaître quelqu’un s’en éloigner » est presque une vertu.
L’écriture, sans cesse, s’immisce dans des zones d’émotions parfois bien incernables, jouant de la dichotomie (présence/absence), de l’éloignement (autre manière de prendre en compte le réel observé).
On ne sait presque pas où l’on va, presque pas s’il y a lieu d’en être serein ou affligé. On ne saisit presque rien, et la poésie incise des parts d’ombre.
Takahashi, entre autobiographie et science du mythe, décrit à merveille les incertitudes du temps, en dépit de la beauté, des œuvres qui subsisteront, des adieux déchirants ; son message, s’il en est un, est celui d’« ouvrir les yeux encore et encore » sur un monde qui ne nous est pas toujours donné.
Philippe Leuckx
D.R. Philippe Leuckx
pour Terres de femmes
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