EXILE
My mother strode forward with her jaw uplifted.
She made sure we found a place in every new world.
My father lagged behind with steps longing only to return.
But there was never a place to go back.
Home no longer existed the minute you needed to leave.
You could grieve all you like but you had to keep breathing.
Their pasts were reserved only for their dreams.
They didn’t even dare tell. Who knows what would occur
If they tried to bind old faiths with new lives.
A child of refugees, I seek their secrets, their sweet memories,
The suffering they hid, willingly and unwillingly,
The part of them that would make me whole.
EXIL
Le menton levé, ma mère avançait d’un pas décidé.
Elle s’assurait que nous trouvions notre place dans chaque monde nouveau.
Mon père traînait des pieds qui languissaient après le retour.
Mais il n’y avait jamais nulle part où revenir.
La maison n’existait plus à partir du moment où vous deviez partir.
Vous pouviez pleurer tout votre saoul mais vous deviez continuer à respirer.
Leur passé était confiné dans leurs rêves.
Ils n’osaient même pas raconter. Qui savait ce qui pouvait arriver
s’ils essayaient de lier de vieilles croyances à de nouvelles vies.
Enfant de réfugiés, je cherche leurs secrets, leurs doux souvenirs,
le chagrin qu’ils taisaient, exprès et involontairement,
cette partie d’eux qui me compléterait.
Karen Alkalay-Gut, Survivre à son histoire, poèmes d’Holocauste, édition bilingue, Revue Nunc | Éditions de Corlevour, 2020, pp. 24-25. Traduction de l’anglais par Sabine Huynh.

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