UN ÉCART DE CONSCIENCE, II
(extrait)
J’ai bien peur que la sensation
dont je voudrais te faire ressentir l’étrangeté
m’ait fui
et qu’il me faille me référer dès lors
à mes seuls souvenirs
pourtant je ne peux encore me résoudre
à parler au passé.
Sans doute convient-il de se trouver
dans une disposition particulière
un relâchement de la volonté
un abandon de tout contrôle
une attente sans attente
sans conjecture ni désir
pour que se produise l’imperceptible miracle.
Le phénomène que je tente de cerner
est si ténu que je ne sais même pas
s’il existe vraiment
pourtant j’en éprouve le vertige
jusqu’aux tréfonds de mon être
et c’est comme si en moi le nerf
d’une perception autre se mettait à vibrer.
Il ne s’agit nullement
d’une quelconque hallucination
la réalité reste telle qu’en elle-même
mais il se produit en elle comme un suspens
une intime discordance
qui ouvre tout à coup une perspective infinie
inattendue.
Jean-Pierre Chambon, Un écart de conscience, II, éditions Le Réalgar, Collection l’Orpiment dirigée par Lionel Bourg, 42000 Saint-Étienne, 2019, pp. 34-35. Photographies de Christiane Sintès.
|
Retour au répertoire du numéro de mai 2019
Retour à l’ index des auteurs
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.