[DES FOIS JE REGARDE LA VIE AVEC SES ABSENCES]
Des fois je regarde la vie avec ses absences.
Un trou sur lequel j’ai une vue plongeante.
Du cimetière ce qu’il en reste.
Sous l’eau.
Sous les bateaux les pédalos de l’été.
Une fontaine.
Un lavoir.
Des dalles de béton au ras de l’eau se soulèvent.
Un château de cartes qui s’effondre. Sans pelle ni râteau.
Armatures de fer rouillé.
Comme l’après d’une guerre. Ses frappes.
Le silence entre deux guerres.
Le sable gris se craquèle et c’est un puzzle qui se déroule à l’infini.
On enjambe. On marche dessus.
Le silence ça commence en 61.
C’est une plage de silence.
De croûtes.
Il y aura l’été. L’été se posera dessus tout ça.
La douceur dans l’air.
L’été sur l’eau profane qui tout aura lavé.
Comme sur les tombes et à l’intérieur.
L’eau aura tout lavé.
À l’intérieur.
Vidé.
Des os voyagent.
Les familles se mélangent.
Encore.
La marche des eaux.
La neige comme un édredon.
L’été comme un pansement.
Avec des matelas.
L’eau y est trop bleue.
On pourrait presque saisir et tirer sa nappe.
Le ciel tendu comme un drap sec.
D’un autre bleu. Propre au ciel.
Le lac on peut y nager.
S’y voir.
Peut-être flotter.
Avec le regard.
Avec les os.
Ça n’arrête pas.
Sophie Braganti, Avant le lac, Propos 2 éditions, Collection Propos à demi, 2018, pp. 43-45.
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