SU UN INSONDABILE VERBO
Sono come svuotato, arso, come un fiasco
che suoni fesso, e se ne duole e se ne lagna
col tavolo di cucina un non santo bevitore;
sono lavagna dei sei anni col suo pieno fitto di belle
lettere, da una maestra nella veste della legge,
scancellata ; sono, tenuto a vista dalla balaustrata,
dai chierichetti in bianco, il mite mentecatto
il muto, il fuco, il cattolico astinente che elegge,
per onorare la memoria, la religione « di una volta »,
una volta all’anno di comunicarsi:
e sono qui, mia Pasqua del 10 luglio, dall’ a alla zeta
a farmi rana, per un’ora pentita e contrita, al momento della lingua
in fuori, a recitare il non sono degno… Riuscirò a tenere in serbo
curvo tornando in fondo ai banchi dei pubblicani
una di quelle lettere, per comunicarti, per me e pei figli
lontani e così vicini, un insondabile verbo? Sii tu il poeta
che decripta quel segno, anfibio come rana, lasciando vivere
la rana! Non scancellare I silenzi dei pantani. Sii Iddio che legge
nel fondo ai peccatori suoi. Sii tu, per noi, un giorno
che duri un anno, della lettura muta, lieta.
SUR UN VERBE INSONDABLE
Je suis comme vidé, desséché, comme une fiasque
qui rendrait un son fêlé, et ce n’est pas un saint buveur
qui s’en désole et s’en plaint à la table de la cuisine ;
je suis l’ardoise de mes six ans toute pleine de belles
lettres serrées qu’une maîtresse en représentant de la loi
efface ; je suis, gardé à vue de la balustrade,
par des enfants de chœur en blanc, le doux idiot
le muet, le faux-bourdon, le catholique abstinent qui choisit,
pour honorer la mémoire, la religion d’« une fois »,
de la communion une fois par année :
et je suis ici, mes pâques du 10 juillet, à me faire
grenouille de A à Z, une heure repentie et contrite, au moment
de sortir la langue, à réciter le je ne suis pas digne… Réussirai-je
regagnant courbé le fond des bancs des publicains à conserver
une de ces lettres, pour te communiquer, pour moi et pour les enfants
lointains et si proches, un insondable verbe ? Sois le poète
qui décrypte ce signe, amphibie comme la grenouille, en laissant vivre
la grenouille ! n’efface pas les silences des marais. Sois Dieu qui lit
dans le fond du cœur de ses pécheurs. Et toi, pour nous, un jour
qui dure une année, de la lecture muette sois heureuse.
Giovanni Orelli, « Courante, 2 » in Concertino pour grenouilles [Concertino per rane, Edizioni Casagrande, CH-Bellinzona], La Dogana, Collection « Poésie », Collection dirigée par Florian Rodari, Genève, 2005, pp. 28-29. Traduction de Jeanclaude Berger et texte italien.
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