[CORPS ÉCRIVANT ET ÉPROUVANT] CORPS écrivant et éprouvant à tout instant à quel point les mots qui lui viennent sont des acteurs vivants et spontanés d’un événement en quelque sorte théâtral, les didascalies et les praticables en moins, de telle sorte que le lecteur croit lire un roman qui s’adresse à son esprit alors que c’est un drame historique dont sa chair est l’un des protagonistes, quoi qu’il fasse. CORPS qui, au fur et à mesure qu’il écrit et s’écrit, semble se prêter en continu, jour et nuit, aux allées et venues d’une troupe de forains pirandelliens et insomniaques en quête de l’auteur d’un ouvrage pourtant bien là, puisque de lui dépend que les saltimbanques cessent d’être des comédiens irrésolus pour devenir des tragédiens belligérants, chtch chtch chtch CORPS VERBAL et CORPS PULSIONNEL d’un seul tenant, ce qui a l’heur de tenir en haleine le CORPS BIOLOGIQUE, en proie à une effervescence de vicissitudes de tous ordres, les mêmes qui en général se retrouvent dans le théâtre antique lorsqu’il est signé par Euripide et Sophocle, ou plus près de nous, Racine et Beckett, ou Tennessee Williams, ou encore quand il est voulu cruel par Artaud. Cette PROPRIÉTÉ qu’ont les mots, quand c’est le corps qui les écrit, de se changer tour à tour, mais sans désemparer, en pitres ou en flibustiers, en dépenaillés de la syntaxe ou costumés de grammaire passementée, en vengeurs ou en munificents, en conservateurs de la substance indépassable, tantôt mystique, tantôt forcenée d’un moyen âge de toutes les folies, les bâtisseuses comme les pestiférées, et redécouvrant ainsi leur modernité, une modernité ennemie des derniers cris de l’obscénité universelle se réclamant de leur prétendue nouveauté pour s’autoproclamer avant-garde chtch chtch |
« Cette PROPRIÉTÉ qu’ont les mots […]
de se changer en "héros" ou en "anti-héros"
d’une pièce injouable »
Collage photographique, G.AdC
MARCEL MOREAU Source ■ Marcel Moreau sur Terres de femmes ▼ → 27 janvier 1974 | Lettre de Jean Dubuffet à Marcel Moreau ■ Voir aussi ▼ → (sur Le Carnet et les Instants) Marcel Moreau. L’écriture comme paroxysme, par Véronique Bergen → (sur Mediapart) Marcel Moreau, à corps écrivant, par Jean-Claude Leroy |
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