NUIT DU MONDE
Un feuillage ténébreux s’insinue sur le balcon de la nuit du monde. Une amante protège de sa paume la flamme qui éclaire son visage. Et il me semble que c’est elle que j’ai tant attendue, «Une femme qui se laisse regarder sans sourire, ou sans rougir, parce qu’elle a compris que la beauté est quelque chose de grave. »1
1. M. Yourcenar, Sixtine
L’INDÉCISE
J’ai rêvé ceci : un bateau fend les eaux noires. La nuit est épaisse alentour, nulle lumière ne filtre du ciel. Aucun son ne provient de nulle part, pas même le glissement de l’écume sur l’étrave et la coque. Mais il est illuminé à la proue de mille feux, et passe…
J’ai refait ce rêve peu après : le même bateau glisse dans l’obscur. Sur le pont, l’un près de l’autre : un garçon et une jeune fille aux longs yeux pleins de larmes. Elle dit d’une voix claire : « Comment saurais-je si je t’aime puisque je n’ai jamais aimé ? » Et le bateau passe, comme une torche dans un puits.
Roland Ladrière, La Ville reflétée in Inconnaissance éblouie suivi de La Ville reflétée, Revue Nunc | Éditions de Corlevour, 2015, pp. 85-87.
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