choisie par Marie Fabre
Source CAINO | PROLOGO CAINO (al pubblico) Guardami – Io con dita di ingegno e di brace ho appeso al sangue le popolazioni in navate di gelo ho spinto rotto e sepolto gli inermi della terra ho vinto tante di quelle volte facilmente ho battuto ho stretto ho colpito forte ho atterrito ho acceso con ira improvvisa tinto d’un fosco la primavera di tutti nel precipizio di un furore senz’argine impossibile da barricare ho tinto l’istante d’un sanguigno somigliante al mio quando gonfiava vicino a me, in me uno strano scuro animale in spinte dalle profondità in risalita furibonda da un ignoto di me da un buio di me da oscure regioni dal fondo di me da un dentro del dentro di me – sua massa d’ombra gonfiava gonfiava d’una marea potente fino al trabocco dal petto in una peste in uno sbattere contro altra carne e mutilarla e penarla in un silenzio dove l’ultimo gemito si raggruma in freddo fratello e apre un tacere che non smetterà. Non smetterà di morire questa vita che passa da una carne a quell’altra non smetterà questa bestia la sua risalita dal petto. Nasce ora, in questa notte Un altro più simile a me. Nasce continuamente. E io questa notte. In quest’ora. Per lui e per me. Ho pietà. Danio Manfredini dans Caino (Teatro Valdoca) Ph. © Rolando Paolo Guerzoni Source CAINO [deuxième prologue] Guardami – Non prometto niente di buono. Sono messo qui a dirti qualche cosa che non capisci bene – Io sono la prima profezia. La profezia che porto nella carne è questa : calpesterai ciò che ami. Molto vicino, intorno e dentro di te – ciò che ti fa vivo lo massacrerai. La profezia è questa : ti butterai in un agire furioso fino alla rovina. Dopo non so. Non so. Non so cos’altro covi. Io sono Caino. Non sono l’antenato non abito un passato favoloso non sono la pagina di un libro io non sono il reietto il primo mal riuscito che s’accantona e si perde una manovra sbagliata della creazione io non sono una patologia malata. Non sono la favola stantia di due fratelli nello scenario vuoto del principio. Io vivo adesso dentro ogni umano, e lo strattono fino all’insolenza, fino al delitto a volte. Sono il tuo infecondo, il secco, la desolata riva da cui guardi la terra fertile degli altri, il loro stare bene e te ne duoli, ti rodi, la più sterile riva su cui piombi stremato, a volte. Sono io il mistero del male che ti attrae e con cui ti batti. Sempre. Mariangela Gualtieri, Caino, Giulio Einaudi editore, Collezione di teatro 424, 2011, pp. 13-14-15-16. CAIN (au public) Regarde-moi Moi de mes doigts de génie et de braise j’ai cloué au sang les populations dans des nefs de glace j’ai poussé brisé et enterré les sans-défense de cette terre tant et tant de fois j’ai vaincu facilement j’ai battu j’ai serré frappé fort j’ai terrifié enflammé d’une colère soudaine teinté de sombre le printemps de tous au fond du précipice d’une fureur sans frein impossible à endiguer j’ai teinté l’instant d’un sanguin semblable au mien lorsque gonflait près de moi, en moi un étrange un sombre animal par poussées venues des profondeurs par remontées furibondes venues d’un inconnu de moi d’une pénombre de moi d’obscures régions du fond de moi d’un dedans du dedans de moi – sa masse d’ombre gonflait gonflait d’une puissante marée jusqu’à déborder de ma poitrine en une peste cogner contre une autre chair la mutiler l’affliger dans un silence où le dernier gémissement se fige en un frère froid et ouvre une heure muette qui ne s’arrêtera pas Elle n’arrêtera pas de mourir cette vie qui passe d’une chair à une autre elle ne s’arrêtera pas cette bête sa remontée depuis la poitrine. Maintenant naît, en cette nuit un autre plus semblable à moi. Il naît à chaque instant. Et moi cette nuit. En cette heure. Pour lui, pour moi. J’ai pitié. Mariangela Gualtieri dans Caino (Teatro Valdoca) Ph. © Rolando Paolo Guerzoni Source CAIN Regarde-moi – je ne promets rien de bon. On m’a mis là pour te dire quelque chose que tu ne comprends pas bien – Je suis la première prophétie. La prophétie que je porte dans ma chair est celle-ci : tu piétineras ce que tu aimes. Tout près de toi, autour et au-dedans — ce qui te rend vivant tu le massacreras. La prophétie est celle-ci : tu agiras avec fureur et précipitation jusqu’à ta perte. Après quoi je ne sais pas. Non. Je ne sais pas ce que tu couves encore. C’est moi Caïn. Je ne suis pas l’ancêtre je n’habite pas un passé fabuleux je ne suis pas la page d’un livre je ne suis pas le rebut le premier mal réussi qu’on délaisse et qui se perd une manœuvre ratée de la création je ne suis pas une pathologie malade. Je ne suis pas la fable avariée de deux frères dans le décor vide du commencement. Je vis aujourd’hui en chaque être humain, et je le bouscule jusqu’à l’insolence, jusqu’au crime parfois. De toi je suis l’infécond, l’aride, le rivage désolé depuis lequel tu regardes la terre fertile des autres, leur bien portance dont tu souffres, te ronges le plus stérile rivage sur lequel tu t’écroules parfois, éreinté. C’est moi le mystère du mal qui t’attire et avec lequel tu te bats. Toujours. Le texte ci-dessus est l’aboutissement d'une traduction collective en langue française, entreprise par les étudiantes du master TLEC (Traduction littéraire et édition critique) de l’Université Lyon 2 (Francesca Caiazzo, Sofia Gérard, Marie-Laurentine Bérenger, Alice Wagner). Sous la direction de Marie Fabre (juin 2015). __________________________________ NOTE DE MARIE FABRE : Caino est une pièce de Mariangela Gualtieri publiée en 2011 chez Giulio Einaudi editore et encore inédite en France. Elle a été écrite dans le cadre du Teatro Valdoca de Cesena, fondé par Cesare Ronconi et Mariangela Gualtieri au début des années 1980. Nous proposons ci-dessus le début du « Prologue », dans une traduction collective faite dans le cadre d’un atelier de traduction pour le master TLEC de l’Université Lyon 2. La meilleure façon de présenter la pièce est sans doute de traduire les premiers paragraphes de la Note de l’auteur qui l’accompagne : « La partie de la Genèse qui concerne Caïn est mouvante, mystérieuse, pleine de silences, suggérant subtilement de possibles dualités : agriculture et transhumance, errance et stabilité, action contemplation, ville et désert, rationalité animalité, elle est en somme pleine d’attractions thématiques. Je me suis tenue à une certaine distance de la page biblique, loin de toute tentative d'exégèse, attirée plutôt par le silence qui règne autour de la figure de Caïn et par la puissance de cette icone : il se découpe, tout à fait seul, dans un désert aveuglant, la mine dure, avec un fratricide qui pèse sur ses épaules, la malédiction de la terre, l’éloignement du visage de la divinité. Puis le voilà qui initie, avec la construction de la première ville, les arts noirs de la technologie – rendus surtout noirs par l’égarement de l’éthique qui n’a pas suivi l’immense évolution de la technologie. Il est frappant de constater que celui qui a construit la première ville est justement un fratricide, un fuyard, un sans-dieux. Peut-être que celui qui a écrit la Genèse se sentait sous la menace d’être actifs et raisonnants et désirants. La menace de l’intelligence. Mais aussi la force de cette énergie qui nous caractérise : ce n’est pas une dégénération, c’est une énergie en dotation. Nous sommes ainsi faits, avec en nous cette impulsion irrépressible pour l’action, avec en nous cette tempête. Caïn nous ressemble tant : il m’a presque semblé qu’avant nous il était impossible de le comprendre tout à fait. Nous sommes seuls comme lui, nous détruisons la vie en dehors et au-dedans de nous, nous allons désormais sans idée de prochain, et nous sommes aussi actifs que lui, loin de tout thème céleste, tous voués à notre être terrestre. Parfois, devant la manière dont les choses ne collent pas dans le récit de ce premier né, j’ai pensé que peut-être la substance dont nous sommes faits est d’amour, à tel point que si nous ne sommes pas aimés nous devenons difformes. » |
MARIANGELA GUALTIERI Source ■ Mariangela Gualtieri sur Terres de femmes ▼ → [Per tutte le costole bastonate e rotte] (poème extrait de Bestia di gioia. Traduction de Marie Fabre) → Giorno d’aspromonte (poème extrait de Senza polvere senza peso. Traduction de Martin Rueff) ■ Voir aussi ▼ → (sur Imperfetta Ellisse) une note de Giacomo Cerrai sur Mariangela Gualtieri, finaliste du Prix Ceppo 2011 de Pistoia (+ bio-bibliographie) → (sur Italies) Una luce «senza ristoro d’ombra». La poesia di Mariangela Gualtieri, par Giorgia Bongiorno |
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