[MÈRE SÉDENTAIRE] Mère sédentaire, qui depuis ma naissance tiens la maison en ordre comme si chaque jour était celui du dernier inventaire, c’est quand je reviens près de toi que j’erre. Ton attente est la même depuis si longtemps que tu ne touches plus la terre. Quand, à tes côtés, je frottais mes semelles sous les tas de feuilles mortes, je ne savais pas que cet ennui était le meilleur de ce que tu pouvais m’offrir. [DES FEMMES DE MA FAMILLE] Des femmes de ma famille, je me souviens avec joie de deux : la noire, à la parole et au cœur précipités, celle qui taillait des pains si bien calés entre ses seins que c’était vraiment le meilleur d’elle qu’elle distribuait, au fond de sa gargote obscure, à des tueurs à fronts de taureau, retour de l’abattoir ; et l’affectueuse, belle à tout savoir, qui m’appela pour la dernière fois et me promit des joies de légende, lumineuse sur son grand lit arrêté dans l’ombre de sa chambre, comme sur une charrette de blé un soir de moisson, belle d’avoir à léguer cette lumière de fin d’été, belle et apaisée, comme si elle vivait la perfection dans son étrange abandon. |
GUY BELLAY Ph. D.R. Michel Durigneux Source ■ Voir | écouter aussi ▼ → (sur Un nécessaire malentendu) un autre poème de Guy Bellay, extrait de Restez, je m’en vais (1975 ; repris in Les Charpentières) → (sur Traversées) In memoriam Guy Bellay, par Bernard Bretonnière → (sur Mobilis) In memoriam Guy Bellay, par Bernard Bretonnière → (sur le site de la Maison de la Poésie de Nantes) une notice bio-bibliographique sur Guy Bellay (+ un poème de Guy Bellay : « Mets-toi nue » [Bain public II, éditions P.-J. Oswald, 1968 in Les Charpentières, éditions le dé bleu, 2002, page 31], lu par Daniel Biga) → (sur le site de Pierre Perrin) une recension des Charpentières |
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