Le 8 août 1730, le manuscrit intitulé La Nuit sylphique reçoit l’approbation d’impression. Cette approbation « est régistrée sur le Livre de la Communauté des Imprimeurs et Libraires de Paris, numéro 1963, conformément aux Règlements et notamment à l’Arrêt de la Cour du Parlement du 3 décembre 1705. » Publiée en 1730 « sans nom d’auteur », La Nuit sylphique, également baptisée Le Sylphe ou le Songe de Mme R*** écrit par elle-même à Mme de S***, met en scène, dans un dialogue savoureux, une vertueuse comtesse, mais dénudée, avec un « sylphe », esprit « impalpable », sensible et amoureux, qui entreprend de séduire la belle par ses discours tentateurs :
« Je sais tout ce qui se passe dans votre âme, ma belle comtesse, je serai respectueux, nous ne sommes entreprenants que quand nous sommes aimés. — Bon, dis-je en moi-même, je ne crois pas que je te mette jamais à portée de me manquer de respect. — N’en répondez pas, dit la voix, nous sommes des amants un peu dangereux, nous savons tout ce qui se passe dans le cœur d’une femme, elle ne saurait former de désirs que nous ne satisfassions, nous entrons dans tous ses caprices, nous vieillissons ses rivales, et nous augmentons ses charmes, nous connaissons toutes ses faiblesses, et quand elle pousse un soupir d’amour, que la nature dans un moment de distraction se trouve la plus forte, nous le saisissons ; en un mot, la plus légère idée de tentation devient par nos soins tentation violente, et bientôt satisfaite. Avouez que si les hommes avaient notre science, il n’y aurait pas une femme qui leur échappât. Ajoutez à cela que notre invisibilité est contre les maris jaloux, ou les mères ridicules, d’une ressource merveilleuse : point de précautions pour prévenir les leurs ; moins d’yeux surveillants qu’on ne trompe avec ce secret. Mais de grâce, ajouta-t-il, cessez de vous cacher à mes yeux, cette complaisance ne vous engage à rien, puisque vous ne me verrez que quand vous le voudrez et que vos sentiments pour moi dépendent uniquement de vous. » À ces mots, je me montrai, et l’esprit, car c’en était un, fit à ma vue un cri qui pensa me faire rentrer sous le drap, je me rassurai pourtant. « Ah ! s’écria-t-il, en me voyant, que de beautés ! Quel dommage qu’elles fussent destinées à un vil mortel ! Il est impossible qu’elles m’échappent. » […]
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CRÉBILLON FILS Source ■ Claude-Prosper Jolyot de Crébillon sur Terres de femmes ▼ → 15 février 1707 | Baptême de Claude-Prosper Jolyot de Crébillon → 13 avril 1978 | La Nuit et le Moment au Petit Odéon |
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