Thierry Metz, Sur un poème de Paul Celan. Variations à partir du poème de Paul Celan : « Il y avait de la terre en eux » (dans une traduction de Jean Daive), écrites par Thierry Metz « comme un signe d’après départ, pour dire l’honneur, l’amitié, le bonheur aussi d’avoir à faire mémoire. » Ci-dessous, un des douze poèmes de cet ensemble. SI CE N’ÉTAIT QUE CE MOT : RICERCARE Si ce n’était que ce mot : ricercare si ce n’était que nous, aujourd’hui, groupés dans le chant de six bergers qui ne se verront jamais, étagés dans la montagne, vêtus de bleu sur la neige, la voix toujours noire si ce n’était que cela : que l’abandon d’une recherche que l’abondance d’un sang, jusqu’où ira ce qui est vrai puisque tout s’appuie sur de l’accompli ? Périgueux le 28/08/93 Thierry Metz, Sur un poème de Paul Celan, Éditions Jacques Brémond, Collection Le premier cent, 1999, s.f. Encres de Jean Gilles Badaire. IL Y AVAIT DE LA TERRE EN EUX Il y avait de la terre en eux, et ils creusaient Ils creusaient et creusaient, ainsi s’en fut leur jour, leur nuit. Et ils ne louaient point Dieu qui, entendaient-ils, voulait tout cela qui, entendaient-ils, savait tout cela. Ils creusaient et n’entendaient plus rien, ils ne devenaient point sage, ni inventaient aucun chant, ne créaient aucune langue. Ils creusaient. Advint un silence, advint aussi un orage, advinrent toutes les mers. Je creuse, tu creuses, et semblablement creuse le ver, et ce qui chante là-bas dit : ils creusent. O l’un, ô nul, ô personne, ô toi : où cela allait-il, puisque cela n’allait nulle part ? Ou tu creuses et je creuse, et je me creuse jusqu’à toi, et à nos doigts s’éveille l’anneau. Paul Celan. Éditions Mercure de France, 1990. Traduction de Jean Daive. |
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