Image, G.AdC [HUWA] « J’ai huit pattes poilues et je ne vois pas pourquoi un État Spirituel serait forcément pur et vaporeux », dit la Tarentule. Huwa Le pronom de l’absent, comme un souffle un hoquet presque Yod Hé Vav Hé L’Imprononçable et moi — une femme — j’épie depuis le dernier rang ceux qui chantent les louanges du Matriciel ou taisent le nom de Ce Qui Est Ivres dedans sobres dehors également barbus également se balançant les cousins n’en finissent pas de se taper dessus — pour faire de la musique ? — Depuis le fond du fond des sièges du fond derrière le mur et les grillages les moucharabieh derrière mon voile et mes yeux bleus et mon indignité moi aussi je me balance moi aussi je T’attends Toi qu’on appelle qu’on n’appelle pas Je suis là à t’attendre comme une araignée dans sa toile comme en novembre on guette l’été fauve Je T’attends comme un ventre femelle attend l’enfant qui germe un sexe d’homme, un axe, un os comme cette poète froide et sèche attend la poésie sans rimes et sans ratures je T’attends Toi et tout ce qui est Toi sans en avoir l’air premières cerises chant sans contour souffle diamant au cœur opaque je T’attends Sans barbe mais avec assez de haine pour tout ruiner assez d’amour pour tout submerger Tissant hexagones octogones dodécaèdres de fil translucide je crache invisible ouvrière les liens entre deux branches et puis je suis la passante qui brise les toiles qui déchire les entrelacs insouciante au chemin d'un sommet si lointain Et de nouveau la Tarentule qui T’attend amant paresseux promesse de flottaison aux lèvres molles T’attends rythme inspiré qui coule des veines du ciel jusque dans mes plumes encrassées T’attends maître sans visage dont le cri dissoudra les frontières J’attends j’attends j’attends et tire la langue devant tous ceux qui chantent la joie de ne plus rien attendre Oh cette envie de déféquer sur vos distiques vos odes vos quatrains oui toi Rûmî, Hafiz, Saint Augustin, la Grande et la Petite Thérèse, mais taisez-vous c’est tout ce que vous avez à dire tout votre chant ce cocorico triomphant d’une aube que nous n’avons pas vue? Vos extases engluées de mots et de triomphes Pitié ! Ravalez-les ! Il n’y a pas de chemin pas de lumière au creux de ces ténèbres la matrice est hermétique ni Maître ni Amant pas de saveurs indicibles pas d’ascension nocturne Il n’y a que ce qu’il y a ce labeur répété de tisser et tisser la toile linceul où je t’attends, la Mort, ma sœur, prophétisant que tu viendras fidèle inévitable t’engluer aux entrelacs de cette toile La mort insecte aux ailes de charogne qui sera mon dernier festin. Mais je T’attends T’attends T’attends T’attends suis un tambour qui frappe T’attends comme un cœur embryon dans l’œuf rouge T’attends T’attends ô rythme sans vouloir du cosmos étoilé T’attends T’attends T’attends T’attends .... Marianne Costa texte inédit pour Terres de femmes (D.R.) |
MARIANNE COSTA Source ■ Voir aussi ▼ → (sur Babelio) une fiche bio-bibliographique sur Marianne Costa |
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