Image, G.AdC
RÊVES LÉGERS, NUIT CLAIRE
Noix se fait vent et nous emmène au pays des Perses
Dans une nuit d’automne
Nous avons léché ta source au nombril
Un automne long comme la lune
Faudrait mettre genou à terre et attendre. Sinon, se retourner,
t’atteindre par notre nom, te laver de quatre eaux différentes,
te faire macérer dans quatre langues, chauffer nos poings à
ton haleine, impatienter nos yeux sur les flammes, en faire
des melons crus et haleter sous un jour en ruine
Les chiens trébuchent au crépuscule et vident notre sang sur
l’été. Un été sec. Une chair blanche. Blancheur de nos
demeures sans nuages qui ne peuvent se retrouver dans
le noir. Les noix enfourchent les chevaux, emportent notre
sommeil et le déposent en ton sein
Comme si tu avais lavé tes tresses
Dans ton sommeil
Éclaboussé de ton sang
Comme si tu avais coupé ta chair en deux
Posé une part devant nous, retourné l’autre dans ta chair
Avec un cœur noir, un hoquet lumineux
Ô toi, cœur, mon cœur lumière
Faudrait fixer l’homme
Le vider de sa panse
Et avancer
Dans la colère pétrifiée de la nuit
Emplissez un calumet avec la suie de nos yeux
Retirez une braise de nos songes
Allez vous asseoir à l’ombre des arbres d’automne
Faites tomber des noix en pelote sur nos nuages
Et tirez
Une bouffée sur le calumet
Une bouffée sur nos yeux
Terre
Ô terre, le malheur nous a fait délaisser nos verges, nos blessures
nous ont empêchés de creuser un quelconque trou
Nous nous sommes tournés vers les calumets, terre
Les œufs passent dans les nids
La noix se fait vent chez les Perses, Ô bouche remise
Elle frappe les nuages dans la mort
Et accueille les vieilles dans l’œil de la source
Faudrait écarter le rouge d’une noire
La poser devant notre jeûne
Et élever ton nombril sur un piédestal
Terre, tu nous a assoiffés
Tu as enseveli nos blessures dans le cimetière des lézards
Tu as grillé les lézards dans la fournaise de midi
Terre, nos villages enfourchent les chevaux et courent les noix.
S’essoufflent les villages dans les traces des vendeurs ambulants
Tandis que tu emmêles la parole et confonds les funérailles,
terre
Un peu de poussière, de fumée, de cendre
Terre
Chair de malheur. Éloignée des langues
Je mettrai une de tes moitiés dans une noix, la laisserai
aux vents des Perses
Aux alentours de l’automne, mettrai l’autre moitié
dans le calumet d’un vendeur ambulant
Et te laisserai partir dans les fumées de la chair
Rose tourne, rose contourne
Sur ton cœur, rose se retourne
Calumet dans le bois du rosier
Village est soir, soir est serpent
Notre sang tourne rose sur ta peur
Seyhmus Dagtekin, Élégies pour ma mère, Le Castor Astral, 2013, pp. 27-28.
Je découvre votre magnifique blog. Déjà, cette musique, si douce, toute l'ambiance qu'il faut au plaisir... J'y reviendrai...
Rédigé par : Serge Prioul | 26 octobre 2013 à 07:59