Ph., G.AdC
IDÉE DU LANGAGE I
I. Un beau visage est peut-être le seul lieu où il y ait vraiment du silence. Alors que le caractère laisse sur le visage les marques de paroles non dites, d’intentions inaccomplies, alors que la face de l’animal semble toujours sur le point de proférer des paroles, la beauté humaine ouvre le visage au silence. Cependant, le silence qui advient alors n’est pas une simple suspension du discours, mais silence de la parole même, le devenir visible de la parole : l’idée du langage. Aussi le silence du visage est-il la vraie demeure de l’homme.
II. Seule la parole nous met en contact avec les choses muettes. La nature et les animaux sont toujours déjà prisonniers d’une langue, ils ne cessent de parler et de répondre à des signes, même en se taisant ; l’homme seul parvient à interrompre, dans la parole, la langue infinie de la nature et à se poser pour un instant face aux choses muettes. La rose informulée, l’idée de la rose n’existe que pour l’homme.
Giorgio Agamben, Idée de la prose [Idea della prosa, Feltrinelli, 1985], Christian Bourgois, 1988, rééd. Collection Titres, 1998, page 102. Traduit de l’italien par Gérard Macé.
GIORGIO AGAMBEN Source ■ Giorgio Agamben sur Terres de femmes ▼ → Écritures bustrophédiques (recension d’Idée de la prose par AP) |
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Bonsoir Angèle,
voyant à la télévision la Corse sous la neige, j'ai eu une pensée pour toi et je suis passée ici faire une promenade poétique. Ce texte est magnifique. Merci à toi.
Et quelle belle aventure éditoriale que ce site. Lieu de passages...
Amitiés,
Agnès
Rédigé par : Agnès O | 24 février 2013 à 20:27