Ph., G.AdC
[QUAND S’APAISE DANS LA NUIT TÉNÉBREUSE]
Quand s’apaise dans la nuit ténébreuse
Le forum enfiévré de Moscou,
Quand les gueules béantes des théâtres
Aux boulevards restituent leurs cohues,
Le long des rues somptueuses ruisselle
La gaieté des funérailles nocturnes,
D’on ne sait quelles divines entrailles
Afflue la foule à la sombre allégresse.
C’est le soleil nocturne que la pègre
Ensevelit, excitée par les jeux.
Elle revient du festin de minuit
Et les coups sourds des sabots l’accompagnent.
Et la ville, nouvel Herculanum,
Est assoupie sous les feux de la lune :
Voici du marché les humbles échoppes,
Voici la fière colonne dorique.
1918.
Ossip Mandelstam, Tristia et autres poèmes, éditions Gallimard, Collection Poésie/Gallimard, 1982, page 74. Choisis et traduits du russe par François Kérel.
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