Image, G.AdC
[TU VIENS SOUVENT AVEC TON OISEAU SUR LE POING]
Tu viens souvent avec ton oiseau sur le poing. Enfin, on le croit. Tu viens et tu attends. Lui ne te ressemble pas, s’impatiente assez vite, gratte le gant de son maître, commence à y planter ses serres. Alors il s’agite de trop sous sa coiffe de cuir, c’est là qu’il a senti une brèche et tu n’as plus le choix : tu lui ôtes son masque, desserres le fil de sa patte et le voilà parti. La moindre chose qui brillait fait chaque fois long feu. Et tu sais avec sûreté ce qu’il repère et tue, car il te le ramène. Mais ce qu’il a vraiment vu, là-bas, la chose hurlant de vie et de lumière, toujours tu la méconnaîtras : tu ne pourras jamais que décrire la prise qu’il dépose à l’instant à tes pieds ― qui marmonne encore, c’est vrai, mais déjà de l’autre berge. En somme, tu es un aveugle. Ta chasse, une simple cueillette. Et pourtant, cet oiseau, tu n’as pas le plus petit souvenir de son bruissement dans l’air, ni de la courbe de son vol. Pour la raison qu’il est en toi. Tu n’as jamais pu repérer précisément où, mais tout cela se passe en toi.
Pluie
au crâne de nacre
Flaque
Perle tranchée
Qui se rappelle
sa naissance ?
Es-tu sûr
de ta main de jour ?
Et de ta main de nuit ?
Est-ce que tu peux
faire chanter
une malle vide ?
[…]
Franck André Jamme, Bois de lune, Fata Morgana, 1990, pp. 25-27-28. Gravures de Richard Texier.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.