Ph., G.AdC
DIALOGO CON I POETI (brano)
Amarti e non poter far altro che amarti, inconvenienza
di cui soffrii una volta e poi non più, per
poi ricadere. Soffrendoti invitavi: parlare
più chiaro, lacerare l’aria di piccoli gridi
ottusi, poi disinfettare l’aria stessa, e
chiamarla amore anch’essa, che tanto ti divideva
dalle mie braccia fuse d’invidia, dai miei
tantrums segreti, dalla tua faccia proclive
che non biasimava se non quasi, il moi affacendare
gli orologi della mente intorno al tuo corpo.
Amare malgrado ottusità, disprezzi
nati e morti, amare per tutta la lunga via
che portava al campo dove tu solerte risparmiavi
le monete gialle, che parlavano d’altri bisticci
d’altre usure, d’altri incantamenti tutti
trapiantati in un unico essere se stessi arrampicati
per un albero. E tenace invitavi: e tenace
respingevo; la danza dagli orli trapuntati
il ricamo sì meraviglioso che era non per
noi che lo sgualcivamo con le nostre tenerezze
di bassa leva. Non era per noi scendere ai
patti, non era per voi decidere se quel fil
di lana portava davvero a quella capanna.
Vi è solo ombra attorno alla capanna, solo
monti morti e vuoti attorno al mio segreto
solo tu con il tuo sguardo puoi prevedere
questa solitudine che si quesita per tornare
ancòra, morta sulla preda.
Amelia Rosselli, “Dialogo con i Poeti”, Serie Ospedaliera 1963-1965, in Le poesie, Garzanti, 1997 ; ried. collana Gli Elefanti, 2007, p. 400. A cura di Emmanuela Tandello. Prefazione di Giovanni Giudici.
DIALOGUE AVEC LES POÈTES (extrait)
T’aimer et ne rien pouvoir faire d’autre que t’aimer, inconvénient
dont je souffris une fois et puis plus du tout, pour
retomber ensuite. Dans la souffrance de toi tu invitais : parler
plus clair, lacérer l’air de petits cris
obtus, puis désinfecter l’air lui-même, et
l’appeler amour à son tour, lui qui tant te séparait
de mes bras fondus d’envie, de mes
tantrums* secrets, de ton visage penché
qui ne blâmait pas ou presque, l’affairement
de mes horloges mentales autour de ton corps.
Aimer malgré les étroitesses d’esprit, les mépris
nés et morts, aimer durant toute la longue route
qui mène au champ où empressé tu épargnais
des pièces jaunes, qui parlaient d’autres fâcheries
d’autres usures, d’autres enchantements tous
transplantés en un unique être nous-mêmes
grimpés sur un arbre. Et tenace tu invitais : et tenace
je repoussais ; la danse aux ourlets piqués
la broderie si merveilleuse qui n’était pas pour
nous qui la froissions avec nos tendresses
de bas étage. Accepter le compromis n’était
pas notre affaire, décider si ce fil de laine menait
vraiment à cette cabane n’était pas votre affaire.
Il n’y a que l’ombre autour de la cabane, que
des monts morts et vides autour de mon secret
il n’y a qu’avec ton regard que tu puisses prévoir
cette solitude qui se questionne pour revenir
encore, morte sur sa proie.
Amelia Rosselli, « Dialogue avec les poètes », in « Dossier Amelia Rosselli, Une brève anthologie », Revue littéraire Europe, n° 996, avril 2012, pp. 215-216. Traduction de Marie Fabre.
* Tantrum : mot anglais signifiant crise (de colère), accès de rage.
NOTE d’AP : ancienne élève de l’École normale supérieure (Lettres et Sciences humaines), Marie Fabre est agrégée d’italien. Après un « master 2 » à l’université de Bologne sur Italo Calvino et Elio Vittorini, elle a soutenu en décembre 2012 (sous la direction de Christophe Mileschi, à l’Université Stendhal – Grenoble 3) une thèse de doctorat sur les rapports entre utopie et littérature chez ces mêmes auteurs. Elle a aussi traduit en français les Variazioni belliche d’Amelia Rosselli pour Ypsilon Éditeur, traduction disponible depuis le 3 mai 2012.
Comment accéder à l'énoncé secret de ce poème ? en suivant l'empreinte des mots ? l'ombre obscure de la rose ?
L'écriture d'Amelia Rosselli est semée de bifurcations ambiguës, décentrée, s'effaçant dans la réverbération des mots qui se cognent les uns aux autres comme sur les parois d'un labyrinthe. Chemin déroulé... pelote de laine dont elle tire un fil pour se lier à l'insistance d'un amour patient comme une doublure, comme un reflet d'elle. Elle semble tâtonner dans le dédale de sa voix suspendue pour tisser le silence et revenir encore... ne rien pouvoir faire d'autre... qu'Aimer...
Rédigé par : christiane | 27 avril 2012 à 17:20
Comme c'est beau... Je ne connaissais pas cette poétesse - je vais voir si je peux trouver quelques-uns de ses poèmes en livres pour pouvoir les emporter dans mon sac à dos et les lire face à la mer.
Merci.
Rédigé par : Bonheur du Jour | 29 avril 2012 à 07:36
C'est avec hâte que j'attends la publication des Variations de guerre chez Ypsilon. C'est grâce à toi que j'ai découvert cette grande poète. Et quelle jubilation de la retrouver dans l'avant-dernier numéro de la revue Europe, dans la traduction de Marie Fabre.
Merci infiniment, chère Angèle.
Rédigé par : Nathalie Riera | 30 avril 2012 à 17:05
Merci pour cette merveilleuse page web. Pourriez-vous me dire si Amelia Rosselli est traduite en espagnol ?
Je suis Nora Albert, poète catalane et également traductrice (je viens de traduire Alda Merini en catalan - le livre sortira dans deux mois approximativement). Nora Albert est le pseudonyme d'Helena Alvarado i Esteve (universitaire). Je suis de Barcelone mais j'habite depuis 20 ans à Ibiza.
Un de mes livres a été traduit en français (il est en voie de publication). Est-ce qu´il serait possible d'introduire quelques-uns de mes poèmes dans votre revue ?
Ci-après mon mail :
noralber[at]yahoo.es
Rédigé par : Nora Albert (Helena Alvarado i Esteve) | 13 février 2013 à 15:15