LE HÉROS (récit)
C’était une forêt je voyais bien comme elle
était collée sur la Terre, je voyais la Terre aussi, sa courbe,
et comme elle était velue cette forêt,
chevelue
de cette forêt plaquée sur elle, dont je voyais
bouger les cimes, onduler ; les cimes longues se tordre
comme algues au fond de l’eau mais c’est dans l’air
sec, que j’entendais le bruissement, le mugissement des
hautes branches enroulées de feuilles vivantes, ça
vit intensément dans l’air, ça, et moi
au même moment j’étais redevenu tout
petit sous les arbres, les troncs
terrifiants des hêtres, bien trop hauts.
Alors je voulais voir seulement les feuilles
des rejets, je marchais dans les feuilles mortes, me disais
écoute ! ― le coucou ― les coups
de la cognée des bûcherons sur les troncs et je voyais
à mes pieds les anémones et le champignon
forcément rouge à pois blancs. ―
Les anémones…
Non, ça n’était pas encore les années Meaulnes, ce temps.
Peut-être je cherchais ma Sylvette et son foulard
forcément rouge à pois blancs je m’étais perdu ―
Ivar Ch’Vavar, in Ivar Ch’Vavar & camarades, Le Jardin ouvrier, 1995-2003, Éditions Flammarion, 2008, page 237.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.