Paul Klee, Der Zeichner am Fenster [L'Artiste à sa fenêtre], 1909 Aquarelle, 30,48 cm x 24,38 cm Collection Felix Klee Source Novembre. Le 11, envoyé six dessins à la Sécession de Berlin. La peinture naturaliste, que je ne cesse de cultiver en vue d’une orientation et d’un apprentissage rigoureux, présente surtout ce désavantage de n’offrir aucun débouché à ma capacité de production linéaire. Il n’y a là, pour ainsi dire, point de lignes en tant que telles, les lignes n’y apparaissent que pour délimiter différentes taches de couleur ou de tonalité. Au moyen de taches chromatiques ou tonales la moindre impression de la nature se peut fixer de la façon la plus simple, la plus fraîche, la plus immédiate. La ligne en tant que telle ne pourrait intervenir dans cette peinture naturaliste d’une rigueur scientifique que si l’on faisait abstraction de la couleur : par conséquent dans une peinture tonale, notamment pour remplacer la délimitation de la couleur entre deux plans d’égale valeur tonale et de différente valeur chromatique dans la nature. Une œuvre d’art dépassera le naturalisme dans laquelle la ligne apparait comme élément pictural autonome tel qu’on le voit dans les dessins et les tableaux de Van Gogh ou dans l’œuvre graphique d’Ensor. Chez ce dernier la juxtaposition des lignes est remarquable dans ses formations graphiques. D’une manière générale, c’est ici que s’ouvre la voie vers un domaine propre à ma ligne. J’arrive enfin à me sortir de l’impasse de l’ornemental dans lequel je m’étais fourvoyé un jour en 1907 ! Nouvellement fortifié par mes études naturalistes, il m’est permis de passer de nouveau sur le terrain originel de l’improvisation psychique qui m’est propre. Là où je ne suis lié que de façon tout indirecte à une impression de la nature, je puis me risquer de nouveau à figurer ce qui obsède l’âme. À noter des expériences vécues susceptibles, dans l’aveugle nuit, de se convertir elles-mêmes en lignes. Là, se trouve depuis longtemps en réserve une possibilité créatrice nouvelle devant laquelle seule l’anxiété de l’isolement m’avait fait reculer en son temps. Ainsi, ma pure personnalité pourra se prononcer et se libérer avec une liberté plus grande. |
PAUL KLEE Ph. Walter Henggeler Source ■ Paul Klee sur Terres de femmes ▼ → 18 décembre 1879 | Naissance du peintre Paul Klee → 29 juin 1940 | Mort du peintre Paul Klee → (dans les Chroniques de femmes) 20 juin 2005 | Ouverture du Centre Paul Klee à Berne ■ Voir aussi ▼ → le site du Centre Paul Klee de Berne |
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Quel témoignage rare, vrai, intense ! Irrassasiable besoin de couleur... Interrogation de la ligne... conflits entre des forces de contrôle nées d'un métier sûr, "rigoureux" et celles, fascinantes, de l'inconscient qui exigeaient qu'il cherche en lui, dans "l'aveugle nuit" ces forces intérieures, indépendantes de sa volonté le menant à "l'improvisation". De la ligne à la couleur une tension frôlant la dissolution. Vertige... Vacillant entre "risque" et cohésion. Intensité, transparence. Peintre du silence, sans cesse fragile et comblé, oscillant entre dessin (souvent au pinceau) et emprise, possession, de la couleur, entre abstraction chromatique et figuration jusqu'à ce que quelque chose émerge. Lignes et couleurs se répondent parce qu'il se concentre sur la couleur, sur sa pulsation. Peintre inclassable, indépendant, musicien et poète en permanente mutation. Qui peint la paix dans la fêlure dans l'attente de la lumière jusqu'à la saturation des couleurs. Et là soudain ces lignes d'écriture et cette aquarelle troublante qui nous offrent le combat secret de toute une vie. Emotion.
Rédigé par : christiane | 12 novembre 2011 à 10:50