[AUJOURD’HUI C’EST BLANC] Ph., G.AdC Aujourd’hui c’est blanc je sors de mes convulsions je contourne le paradis je retourne chez El Idrisi chercher la carte de mes anciennes terres rien ne me donne l’assurance de l’abreuvoir que j’ai érigé en source de vie je regarde ma main et je longe ma route rien à l’horizon de cet âge que j’ai créé au paradis l’ennui, l’ennui ! et si le rêve n’est qu’un mot en trop et si aimer n’a pas encore été inventé et si par malheur l’être n’est qu’un mollusque et si son image n’est que poussière de rue Aujourd’hui c’est blanc je sors de ma page je contourne ma vie rien de plus pénible que de perdre son mot quand la plume refuse d’écrire le mal des mots je vais chez Magellan naviguer jusqu’en Thessalie de l’ancienne ère des êtres de feu l’étoile condescendante descend et prie au pied d’Achille faillant à l’ambroisie je rejoindrai Troie et prierai Hélène de me réciter l’ode qui ensorcela Pâris dans ses tiroirs j’irai chercher mes clés ou l’ouvroir magique du secret de ma vie Aujourd’hui c’est blanc je sors de moi je contourne mon âme sur le bord de la route je dis au hasard Si tu n’as pas de compagne, j’accompagne ta vie Mahdia Benguesmia Texte inédit pour Terres de femmes (D.R.) Ph., G.AdC |
MAHDIA BENGUESMIA Mahdia Al Khalifa-Benguesmia est Maître de Conférences à la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de l’Université de Batna (Algérie). Ancienne élève de l’Université Paris-Sorbonne (Paris-IV), elle enseigne la théorie de la littérature, la littérature française et la littérature maghrébine d’expression française et comparée. Elle est l’auteure de Nedjma de Kateb Yacine ou l'Antigone algérienne (thèse, 1998) et Entre le royaume en exil chez Malek Haddad et L’Exil et le Royaume d’Albert Camus, Convergences et Divergences autour de deux concepts : la langue et la patrie (thèse, 2008). |
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Poème lancinant, si beau, si pur. Une page blanche comme une mer où la nageuse fendrait l'écume du silence pour inscrire les couleurs d'un lendemain irisé...
Rédigé par : christiane | 30 mars 2011 à 11:02
J’aime beaucoup votre Blanc, Mahdia Benguesmia, et je vous emmène en voyage :
AIR MEDITERRANEE
Ce voyage en Egypte commence par Corinthe,
Les cyprès bleus s'amarrent au pôle,
L'avion sur le vieux continent inscrit sa trajectoire,
Elle se perd quelque part du côté du Trocadéro.
Une montre à la place d'une boussole,
Les fuseaux horaires dans le sud lointain,
Comme les oliviers de Palestine
S'accrochent aux collines en fond de mer.
L'âpreté de l'exil sur les rives du Jourdain
A le goût des raisins de l'hiver.
Cette vieille dame dans l'épicerie d'un matin de novembre
Cherchant en vain des raisins de Smyrne,
Me fit confondre Carthage avec Malaga.
Cette mer laquée marine au beau milieu des terres,
S'arrête là devant le canal,
Ferdinand pour toujours a brisé le cordon,
Hannibal drapé dans le sirocco chaud
A perdu sa bataille ;
Ses navires armés par Scipion l'Africain
Ont vu s'enfoncer la ligne de flottaison,
Et comme une île noyée dans le bleu du ciel
Tout autour de la carlingue,
Les nuages à mes pieds écument l'horizon.
Entre ciel et mer j'ai choisi de voguer
Il paraît que nous ferons escale à Chypre.
Amicizia
Guidu ____
Rédigé par : Guidu | 31 mars 2011 à 14:46
A Christiane
Merci pour votre mot si beau si pur aussi ! un sentiment d’une blancheur éclatante qui nargue le gris "virtuel" de la page d’Angèle et vient me prouver que le "lendemain irisé" que vous lisez dans mon poème est d’abord celui que nous sommes entrain de savourer et de partager sur cette belle terre de Corse qui fait magiquement fondre, dans un bel élan d’amour, nos frontières les plus tenaces.
A Guidu ANTONIETTI di CINARCA
Votre blanc me plaît beaucoup aussi. C’est d’ailleurs, je crois bien, votre blanc qui a rendu le mien éclatant. Et là, je pense au Narcisse, à la blancheur du mot autant qu’à celle de la fleur ; à la pureté de la lumière qui traverse la chose et son symbole dont vous savez merveilleusement, en tant que maître de la couleur, extraire le diamant.
Votre réaction me convainc plus de l’efficacité de la vision du peintre et du poète (que vous êtes)à mieux expliquer la pureté.
Mais si le narcisse demeure, malheureusement, lié dès la naissance de son mythe à la tragédie de Perséphone et du personnage dramatique des « Métamorphoses », c’est parce que sa pureté a dérangé quelque part la morale des hommes, et la psychanalyse, en mauvais (e) élève de la mythologie, est venue en faire une image plutôt brutale du regard que l’homme voudrait donner de sa profondeur.
Merci infiniment aussi de votre élégante invitation au voyage dans cette mémoire éloignée des guerres puniques, que je perçois devenir miraculeusement sous votre plume une mémoire plutôt allégée par la construction de ponts en Méditerranée, par la création de dessins égayant le regard et le goût par la saveur des sucres des raisins d’Izmir et par l ’AIR, combien AIR enivrant de votre poésie, qu’alourdie des pas des éléphants d’Hannibal qui trituraient tout à leur passage en Méditerranée.
Si Baudelaire avait imaginé combien les voyages des poètes du vingtéunième siècle amuseraient la plume et donneraient l’envie de transgresser les limites les plus inimaginables du savoir, il aurait appelé les mots par leurs propres signifiants et aurait splendidement mis à la place de " Luxe, calme et volupté " le terme combien idyllique de "CHYPRE".
Le premier Avril ne serait –t-il pas aussi, comme le narcisse, un emploi tordu de l’esprit du mot qui ne croit pas toujours à la parfaite générosité du mot ? Car aujourd’hui il me fait preuve, contre toute preuve poissonneuse, d’une grande sincérité de la douceur de son eau!
Amicizia
Mahdia
Rédigé par : Mahdia Benguesmia | 01 avril 2011 à 07:15