Le 22 décembre 1639 naît à La Ferté-Milon, dans l’Aisne, Jean Racine. Image, G.AdC Son père, Jean Racine, était greffier du grenier à sel et procureur au baillage de la ville. Sa mère, Jeanne Sconin, était fille d’un procureur du Roi des Eaux et Forêts de Villers-Cotterêts. Très tôt orphelin, de mère à l’âge de deux ans et de père à quatre ans, il est recueilli par son grand-père paternel, tandis que sa sœur Marie est recueillie par les grands-parents Sconin. En 1649, Jean Racine est scolarisé aux Petites Écoles de Port-Royal. Port-Royal où sa tante, Agnès Racine, était entrée en religion (1642) et avait pris le voile sous le nom d’Agnès de Sainte-Thècle. Il rentre ensuite au collège de Beauvais où il poursuit ses enseignements jusqu’en 1655, puis, en 1658, au collège d’Harcourt, à Paris, pour y étudier la philosophie. Quelques semaines plus tard, il apprend la mort d’Antoine Le Maître, éminent avocat qui, s’étant pris d’affection pour le jeune orphelin, lui avait enseigné l’éloquence et la rhétorique. En 1660, Racine remet à la troupe du Marais Amasie, sa première tragédie. Elle lui est refusée. Avant d’être perdue. L’année suivante, il présente à l’Hôtel de Bourgogne les Amours d’Ovide. Cette fois encore la pièce est écartée. En novembre 1661, Racine quitte Paris pour Uzès, où son oncle Antoine Sconin occupe la charge de vicaire général. Racine compte obtenir un bénéfice ecclésiastique dans le diocèse d’Uzès. Ces quelques mois d’« exil » se révèlent infructueux et Racine rentre à Paris. Il obtient une pension du roi pour avoir composé pour lui des poèmes de circonstance : Ode sur la convalescence du Roi (qui a contracté la rougeole), Ode de la Renommée aux Muses. Le poète renoue avec le monde du théâtre et s’éloigne de Port-Royal. IPHIGÉNIE En août 1674, Racine, mis en difficulté par ses adversaires et rivaux, présente à Versailles son avant-dernière pièce profane, Iphigénie. Créée lors des divertissements royaux qui célébraient la conquête de la Franche-Comté, l’auteur prétend toucher le spectateur sans avoir recours aux effets spectaculaires de l’opéra. La pièce, tout empreinte de « tristesse majestueuse », connaît un immense succès. Hors la Champmeslé, qui interprétait le rôle d’Iphigénie, la distribution de la pièce est aujourd'hui inconnue. Tragédie en cinq actes et en vers, Iphigénie se déroule en Aulide, sous la tente d’Agamemnon. Les Grecs attendent en vain les vents favorables qui leur permettront de mettre les voiles vers Troie. Ils ne pourront prendre la mer que si Agamemnon, leur chef, accepte de sacrifier sa fille Iphigénie. Ainsi en a décidé le devin Calchas. |
Source ACTE IV, Scène 4 IPHIGÉNIE, AGAMEMNON, CLYTEMNESTRE, ÆGINE CLYTEMNESTRE Venez, venez, ma fille, on n'attend plus que vous ; Venez remercier un père qui vous aime, Et qui veut à l'autel vous conduire lui-même. AGAMEMNON Que vois-je ? Quel discours ? Ma fille, vous pleurez, Et baissez devant moi vos yeux mal assurés. Quel trouble ! Mais tout pleure, et la fille et la mère. Ah ! malheureux Arcas, tu m'as trahi ! IPHIGÉNIE Mon père, Cessez de vous troubler, vous n'êtes point trahi. Quand vous commanderez, vous serez obéi. Ma vie est votre bien ; vous voulez le reprendre : Vos ordres sans détour pouvaient se faire entendre. D'un œil aussi content, d'un cœur aussi soumis Que j'acceptais l'époux que vous m'aviez promis, Je saurai, s'il le faut, victime obéissante, Tendre au fer de Calchas une tête innocente, Et respectant le coup par vous-même ordonné, Vous rendre tout le sang que vous m'avez donné. Si pourtant ce respect, si cette obéissance Paraît digne à vos yeux d'une autre récompense, Si d'une mère en pleurs vous plaignez les ennuis, J'ose vous dire ici qu'en l'état où je suis Peut−être assez d'honneurs environnaient ma vie Pour ne pas souhaiter qu'elle me fût ravie, Ni qu'en me l'arrachant, un sévère destin, Si près de ma naissance en eût marqué la fin. Fille d'Agamemnon, c'est moi qui la première, Seigneur, vous appelai de ce doux nom de père ; C'est moi qui si longtemps le plaisir de vos yeux, Vous ai fait de ce nom remercier les Dieux, Et pour qui tant de fois prodiguant vos caresses, Vous n'avez point du sang dédaigné les faiblesses. Hélas ! avec plaisir je me faisais conter Tous les noms des pays que vous allez dompter ; Et déjà d'Ilion présageant la conquête, D'un triomphe si beau je préparais la fête. Je ne m'attendais pas que pour le commencer, Mon sang fût le premier que vous dussiez verser. Non que la peur du coup dont je suis menacée Me fasse rappeler votre bonté passée. Ne craignez rien. Mon cœur, de votre honneur jaloux, Ne fera point rougir un père tel que vous ; Et si je n'avais eu que ma vie à défendre, J'aurais su renfermer un souvenir si tendre. Mais à mon triste sort, vous le savez, Seigneur, Un roi digne de vous a cru voir la journée Qui devait éclairer notre illustre hyménée ; Déjà, sûr de mon cœur à sa flamme promis, Il s'estimait heureux ; vous me l'aviez permis. Il sait votre dessein ; jugez de ses alarmes. Ma mère est devant vous, et vous voyez ses larmes. Pardonnez aux efforts que je viens de tenter Pour prévenir les pleurs que je leur vais coûter. Racine, Iphigénie, Acte IV, scène 4, in Théâtre II, GF-Flammarion, 1965, pp. 174-175. Paul Delvaux (1897-1994) Le Sacrifice d'Iphigénie, mars 1968 Huile sur toile, 188 x 142,2 cm Collection privée Source |
■ Jean Racine sur Terres de femmes ▼ → 17 novembre 1667 | Création d’Andromaque |
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