Le sentiment-Je : un sentiment d'être-responsable-de. (Il ne saurait accompagner un verbe passif.) Je me réveille le matin avec une violente migraine et je crie: « Aïe ! ». Ce cri est involontaire et dénué de tout sentiment-Je. Puis je me dis : « J'ai une gueule de bois » ; une certaine dose de sentiment-Je accompagne cette pensée ― l'acte consistant à localiser et identifier la migraine est de mon fait ― mais une dose très faible. Puis je me dis : « J'ai trop bu hier soir. » Maintenant, le sentiment-Je est beaucoup plus fort : j'aurais pu boire moins. « Une » migraine est devenue « ma » gueule de bois, un incident de mon histoire personnelle. (Je ne peux pas identifier ma gueule de bois en montrant ma tête du doigt et en gémissant, car ce qui la rend mienne est mon acte passé et je ne peux pas montrer du doigt le moi d'hier.) W.H. Auden, Dichtung und Wahrheit (An Unwritten Poem), in Quand j'écris Je t'aime, Éditions du Rocher, Collection Anatolia, 2003 ; Collection Points Poésie, 2009, page 56. Traduit de l'anglais par Béatrice Vierne. NONE (extrait) The Madonna with the green woodpecker, The Madonna of the fig-tree, The Madonna beside the yellow dam, Turn their kind faces from us And our projects under construction, Look only in one direction, Fix their gaze on our completed work: Pile-driver, concrete-mixer, Crane and pick-axe wait to be used again, But how can we repeat this? Outliving our act, we stand where we are, As disregarded as some Discarded artifact of our own, Like torn gloves, rusted kettles, Abandoned branch-lines, worn lop-sided Grindstones buried in nettles. This mutilated flesh, our victim, Explains too nakedly, too well, The spell of the asparagus garden, The aim of our chalk-pit game; stamps, Birds' eggs are not the same, behind the wonder Of tow-paths and sunken lanes, Behind the rapture on the spiral stair, We shall always now be aware Of the deed into which they lead, under The mock chase and mock capture, The racing and tussling and splashing, The panting and the laughter, Be listening for the cry and stillness To follow after: wherever The sun shines, brooks run, books are written, There will also be this death.
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W.H. AUDEN Source ■ Voir/écouter aussi ▼ → (sur Wikipedia) la page consacrée à W.H. Auden (telle qu'agréée le 13 mai 2010 par The W.H. Auden Society) → (sur le site de la BBC) une notice bio-bibliographique (en anglais) sur W.H. Auden → (sur le site de la BBC-Radio 3) l’intégralité d’Horae canonicae lue par Tom Durham (6 avril 2007) → (sur YouTube) W.H. Auden disant The Shield of Achilles |
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"Funeral blues", magnifique ! quelle voix, quel visage! (Poème rendu célèbre par le film Quatre mariages et un enterrement. Moment fort de ce film.)
Un écrivain à re-découvrir. Hélas, peu de notes en français...
Rédigé par : christiane | 11 août 2010 à 18:16