Source MARCHE FORCÉE Tu les vois s’avancer vers le vide. Certains d’entre eux brûlants soldats hallucinés déambulent à grands pas, quand tant d’autres s’enlisent, tremblent en sanglotant, s’enracinent vaincus, statufiés pressentis, en quête de repos. Les plus anxieux réclament, appellent la présence, et l’incertaine manne de vieux mots prometteurs, cherchant l’odeur du calme et la maigre étincelle d’un sursis minuscule qui ne dit pas leur nom. Quand les plus silencieux et les moins quérulents détournent le regard, timide exagéré, pensant qu’il est trop tard, que les dés sont mouillés, que la fête est ternie, que l’oubli est ici. Cette confiance aveugle vécue pendant l’enfance tu la retrouves encore dans quelques yeux très rares, crédulité ouverte cueillette de baisers, mains tendues et tendresse appuyée sur un leurre. Implacable glissade qui confond les époques, empilements d’histoires, dilution des données, repliements provisoires comme un fin parachute, un mouchoir à carreaux, un résumé de lit. Tu les vois s’avancer vers le vide et tu respires parmi eux. avril 2010 Marie-Thérèse Peyrin Aux Devoirs de Mémoire, Proximités Sensibles (États 1) Texte inédit pour Terres de femmes (D.R.) |
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Quoi de plus généreux que le doute ? (c'est aux yeux de ma mère auquels je pensais, en écrivant cela...). Aujourd'hui..."ILS" me disent : "c'est une cataracte"... "c'est rien... ça s'opère...".
Rédigé par : Gill M. | 22 avril 2010 à 15:07
Ce poème est bouleversant. Il me bouleverse. Les mots y disent combien son auteur(e) est en empathie avec ceux qui traversent pareille souffrance et pareil abandon! Il faut vivre au jour le jour auprès des plus démunis pour com-prendre (prendre avec soi). Et MTH le fait dans sa grande générosité.
Un mot sur la forme, qui me surprend, par un classicisme auquel je ne suis plus habituée. Etrange comme nous revenons parfois à des structures anciennes, que l'on croyait oubliées.
Rédigé par : Angèle Paoli | 23 avril 2010 à 18:04
Merci chère Angèle. Il est très difficile d'écrire de façon à la fois pudique et lucide ce qui se passe dans la rencontre avec la souffrance de l'autre. C'est la loi du silence et de l'anonymat qui prévaut au delà des murs et des situations. Le silence et l'ellipse procèdent aussi de la confidentialité due aux personnes.Seul le poème peut envelopper tout cela. Pour la forme, elle est venue toute seule.C'est un texte qui a besoin d'un rythme particulier,suffisamment familier pour faire passer l'émotion que je ne veux pas laisser déborder. Rencontrer l'autre, c'est se mettre en creux étanche et extensible pour mieux l'accueillir. Mais il y a des limites. Il faut pouvoir border et bercer. Il faut apprendre à passer à la ligne.
Rédigé par : Mth Peyrin | 23 avril 2010 à 22:22