Ph., G.AdC MORT EN ÉTOILE Je plonge à l’oblique du corps eau glaciale qui brûle à l’aplomb tête première vers le fond nuages inversés qui glissent sur le sable caresse douce peau contre peau les abysses du ciel avalés par la mer et mes bras qui ânonnent des gestes oubliés et mes pieds poussent vers le haut je remonte en bulle et flèche sous le soleil personne ne répond mais je n’attends que le silence et l’éphémère bonheur de plonger en eau froide solitaire dans la beauté de la vague qui roule ses algues douce barrière de corail l’épervier plane en cercles immobiles et mes pieds dansent sur les rondes du sable la neige luit de toute sa candeur au fond des eaux miracle des images inversées je bois et débois le sel qui emplit ma bouche douce-amère j’expulse en m’étirant vers le ciel les songes qui m’entent et mentent moins que les mensonges j’avale les mots des autres et les déjecte dans mon vol je mortelle immortelle je danse dans ma vérité moins fausse que les dires je me dédis me délie me dénoue des mots dits faux-semblants glue qui innerve les veines et je dansedanse dans le soleil et crie dans le matin est juste la neige qui étincelle sur les cimes en grand silence blanc est juste l’eau qui pépite en cascade sur les roches luisantes est juste le printemps qui pousse sa volonté à naître sous la pierre est juste le friselis du courlis bleu sur la crête des vagues est juste le village étourdissant de lumière dans son écrin de nacre est juste le grand air froid qui bleuit le ciel à grande eau est juste le pré ondoyeux de brebis mérinos est juste ma plongée dans l’eau qui brûle la peau lèvres contre lèvres baiser profond sexe contre sexe sans mot à dire et à dédire sinon celui de la beauté droite je suis-je mortelle immortelle dans mon dit qui danse sous ma langue à l’aplomb des abysses du ciel et de la mer Mort en étoile au sommet de la vague. Angèle Paoli, in Sels, Revue Thαuma, n° 8, avril 2011, pp. 154-155. |
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Ça me rappelle, Angèle, tu vois… une espèce d’incantation, un texte-chant qu’on n’offrirait qu’à certaines époques, un ouvre-saison, une sorte de feu de la Saint-Jean sur la langue, et on saute, on tombe, on se relève, on meurt et on vit, et sous les pieds c’est terre cendre et sel, mélangés, mais un peu plus, terre cendre et sel dans le creuset de la parole, oui, ça devient autre chose que l’on nomme, une autre terre que l’on nomme.
Merci
Rédigé par : johal | 05 février 2010 à 21:48
"En attendant il me faut vivre sans prendre ombrage de tant d'ombre". Car les mots , depuis longtemps ne laissent plus indemnes, et s'inscrivent sur la peau, comme ces taches de naissance, afin d'abolir la frontière entre la vie et les sacrés-sucrés de la mort.
Rédigé par : Hélène L | 06 février 2010 à 09:09