Ph., G.AdC ÉLÉVATION DU FEU, I Tu regardais la mer, tu voyais que la mer, te regardait. On ne sait jamais ce qui va vous atteindre dès lors que l’on lève les yeux sur le monde, quelle averse de lumière, quel champ de blé, quelle balle pure cherchant à se loger. Ni pourquoi ce moment-là fut qui demeure seul vivant entre les morts. Comme un chien orphelin survivant jusqu’à son maître avance distrait dans le jadis abstrait et calme. Combien de vers iront ton chemin, combien d’âmes mortes, combien de reflets. Dans le grain de tes yeux s’additionne tout ce qui se refuse, le nombre creux, la somme basse mordante de toutes les marées. La mer devant s’agite comme un sang benêt s’épuise à se penser loi et reine. Quand de grands végétaux mobiles, poursuivent leur chemin, et qu’une étoile souple, s’appuie contre ton dos. Tu me dictes la rime au henné, et tu dors dans les parts, comme un qui n’est plus rivé à la forme. Ce parfum de rose sous tes aisselles, quand midi mégère par le fond aigre des paniers, et que terre déborde, les urines et les selles, la couronne chauve et le pain des pieds. Une lune est là, et bientôt une autre, puis toutes. Tu mensonges un aveu depuis la chambre : les mots ne laissent pas de traces. Qu’est-ce qui retient la mer de s’en aller, le regard sans âge que tu poses doucement sur elle. *
Carole Darricarrère, « Élévation du feu, I » (extrait) in Demain l’apparence occultera l’apparition, Éditions Isabelle Sauvage, 2009, pp. 102-103. |
CAROLE DARRICARRÈRE ■ Carole Darricarrère sur Terres de femmes ▼ → [Bleu est un chemin d’ambiance dans le rouge] (extrait de Beijing Blues) → Les doubles jeux du (Je) (note de lecture sur le recueil Le (Je) de Léna) → Face à face avec mes mains → Imagine qu'un matin... (notice bio-bibliographique) → Je coupais souvent à travers champs → Nous vécûmes → (dans l'anthologie poétique Terres de femmes) Ulysse (Joyce remixed) → (dans la galerie Visages de femmes) le Portrait de Carole Darricarrère (+ un extrait du recueil Demain l’apparence occultera l’apparition) |
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Quel beau texte !
" Tu mensonges un aveu depuis la chambre..." J'♥.
Merci pour ce billet et la découverte.
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Rédigé par : Sabine | 24 janvier 2010 à 21:22
Mercredi 26 mai 2010, de 13:00 à 16:00, au Petit Palais, Paris (avenue Winston Churchill - Paris 8e), dans la cadre du Séminaire mensuel public de la Mel et l’université Paris Ouest, Jean-Michel Maulpoix (écrivain, professeur à Paris Ouest), accueillera Carole Darricarrère.
Rédigé par : Agenda culturel de TdF | 22 mai 2010 à 00:08