Image, G.AdC Paris, 28 janvier 1888
Stéphane Mallarmé
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Paris, le 30 janvier 1888 Monsieur, Je me permets de vous répondre à la place de Monsieur Baronnet, qui n’est pas en état de le faire lui-même, il a été très touché par votre lettre, aussi bien que par votre poème, il l’a relu deux fois et a déclaré qu’il était décidément « impérial » mais pas « omnibus », vous comprendrez sans doute ce que cela veut dire, il était touché encore davantage par les marrons glacés que vous lui avez fait porter en remerciement des dattes dont vous avez fait si grand cas, lorsqu’il a ouvert le joli carton il en a goûté tout de suite, alors il s’en est donné à cœur joie et les a mangés tous les uns après les autres, mon Dieu, vingt-quatre marrons glacés d’un coup, je n’ai jamais vu cela, mais si le cœur y était le foie n’a pas suivi, pas longtemps tout au moins, une demi-heure plus tard je l’ai trouvé effondré sur le divan, j’ai appelé le docteur Faure mais c’était déjà trop tard, quel malheur ! il ne méritait pas cela, il y avait de mauvaises langues qui le traitaient de goinfre ce qui est bête et méchant, c’était simplement qu’il aimait trop la vie, et voilà, il n’en a plus. Je vous prie de croire, Monsieur, à mes sentiments les plus respectueux. Mademoiselle Roux-Fouillet Marie-Jeanne La gouvernante |
Correspondances Intempestives, à la folie… pas du tout, Triartis, 2008, pp. 92-97.
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STÉPHANE MALLARMÉ Image, G.AdC ■ Stéphane Mallarmé sur Terres de femmes ▼ → Pli selon pli → Tristesse d’été → 29 mai 1912 | Création de L’Après-midi d’un faune → 21 mars 1914 | Première audition de Trois poèmes de Stéphane Mallarmé de Debussy ■ Voir aussi ▼ → (sur le site de l'Alliance française) La mort de Stéphane Mallarmé (extraits du Journal de Julie Manet en date du 11 septembre 1898) |
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J'adore ce jeu, c'est comme un blog surréaliste, un jeu de "cadavre exquis" (mais les internautes n'en sont pas loin sur certains blogs, tant le dialogue y fait place au croisement improbable de météores lancés sur des trajectoires différentes), c'est aussi un jeu de séduction...
Ces textes cachent, sous leur espièglerie, un trésor : ces trois dattes qui sont l'offrande de l'hospitalité dans le désert. Trois dattes, un peu de lait de chèvre, l'eau gardée dans une gourde pour le voyageur, le pain travaillé par la paume des femmes et cuit sur les pierres brûlantes et l'appel de l'immensité des sables coule jusqu'à nos pieds, mais aussi son aridité et ces peuples d'Ethiopie repoussés par la sécheresse jusqu'aux confins des villes. On n'y meurt pas d'indigestion, mais de faim... ou de razzias de bandes armées...
Rédigé par : Christiane | 28 janvier 2009 à 17:39