Ph., G.AdC
DEPUIS TANT D’ANNÉES…
pour Arpád Szénes
Depuis tant d'années je lave mon regard
dans une fenêtre où ciel et mer
depuis toujours sont sans s'interrompre
où leurs vies sont un, sont innombrables
sont une fois encore dans mon âme
un champ magnétique d'épousailles
une goutte de lumière-oiseau.
Depuis tant d'années je lave mon regard
à la première couleur si fraîche
sur les lèvres humides de nuit
d'être la peau et d'être la pierre
où mes doigts rencontrent le secret,
ce savoir qu'ils sont et celui qui est
des tonnes infinies de lumière.
Du plus pâle au tranchant du plus sombre
sans s'interrompre entre sang et pensée
entre feuille pinceau étendue
corps de liquide musique à jamais ―
Lorand Gaspar, Cahier Lorand Gaspar, éditions Le Temps qu’il fait, Cahier Seize, sous la direction de Daniel Lançon, avril 2004, page 71.*
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NOTE d'AP : ce poème a été publié en 2001 dans la collection Poésie/Gallimard : Lorand Gaspar, Sidi-Bou-Saïd, Patmos et autres poèmes, p. 43.
CAHIER LORAND GASPAR ― QUATRIÈME DE COUVERTURE
« À la fin des années soixante, en pleine émergence des littératures contemporaines, un homme qui écrivait en hongrois dès l'âge de onze ans, décide, une dizaine d'années après l'achèvement de ses études de médecine en France, de rédiger ses réflexions de chirurgien et ses premiers poèmes en français. Des pages du futur Quatrième état de la matière paraissent à Londres et à Bruxelles et l'auteur est bientôt révélé à Paris. Depuis, les reconnaissances culturelles n'ont pas manqué, lui donnant rendez-vous avec l'histoire des Lettres françaises, et avec de nombreux lecteurs.
Ce volume se voudrait l'illustration du parcours de ce Magyar vivant dans le monde arabe et en France, ayant porté très haut la relativité culturelle heureuse tout en étant resté constamment fidèle à ce qu'il y a de plus optimiste dans la relation de la francité à l'universalité possible. Lorand Gaspar attire dans la langue française le poème hongrois, grec, allemand ou anglais, la réflexion italienne, de même ses traducteurs l'introduisent-ils dans leurs nations littéraires. À rebours d'un cosmopolitisme fruit d'éclectismes qui ne sont bien souvent que des positions de confort socio-intellectuel, l'auteur maintient l'exigence d'un chant du monde en des lieux de souffrance, quotidienne, privée ou collective, position que l'on sait si difficile à tenir. »
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