Il y a cent-treize ans, le 26 septembre 1903 naissait à Dvinsk, en Russie, Marcus Rothkowitz, dit Mark Rothko. Image, G.AdC Quatrième enfant de Jacob Rothkowitz et d’Anna Goldin Rothkowitz, Marcus Rothkowitz reçoit un enseignement hébraïque à l’école talmudique pour enfants. En 1910, Jacob Rothkowitz embarque seul pour les États-Unis. Deux des enfants rejoignent leur père en décembre 1913. Anna et les deux autres enfants (Sonia et Marcus) arrivent aux États-Unis le 17 août de la même année. Installé à New York à partir de 1925 pour y faire une carrière artistique, le peintre s’oriente d’abord vers « un expressionisme sombre » très apprécié à l’époque. En 1929, il rencontre Adolph Gottlieb avec lequel il se lie d’amitié, et fonde, en 1935, le groupe The Ten. De cette époque datent les premières expositions réalisées à New York. Du 16 décembre 1935 au 4 janvier 1936, à la Montross Gallery, Rothkowitz propose trois œuvres de 1934 : Seated Nude, Woman Sewing, City Phantasy et Subway, qui date de 1935. En janvier 1936, Rothkowitz présente au Municipal Art Galleries, une Crucifixion de 1935. En 1936, toujours à la Montross Gallery, Rothkowitz montre Interior, Music et Portrait. La même année, la Galerie Georgette Passedoit accueille The Family. Progressivement, le peintre délaisse l’expressionnisme pour se tourner vers une inspiration plus personnelle marquée par la mythologie. De cette époque, au cours de laquelle ses toiles se couvrent de personnages chimériques, datent Antigone (1939-1940), Œdipe (1940) et Sacrifice of Iphigenia (1942). En 1939, le groupe The Ten se dissout et en janvier 1940 l’artiste prend le nom de Mark Rothko. En 1945, la galerie « Art of this Century » de Peggy Guggenheim, qui s’intéresse aux « créateurs de mythes », offre à Rothko la possibilité d’une exposition personnelle. À partir de 1947, la peinture de Rothko tend à une simplification des formes et à de plus en plus d'abstraction. Les figures s’estompent, se raréfient, cédant la place à des espaces de couleurs vives aux contours irréguliers. Number 17, Multiform n° 8. Progressivement le travail de Rothko se transforme. Il évolue, selon les déclarations du peintre, « vers plus de clarté, vers l’élimination de tous les obstacles entre le peintre et l’idée, et entre l’idée et le spectateur ». Parmi ces obstacles, « la mémoire, l’histoire ou la géométrie ». « Autant de marécages généralisateurs d’où l’on peut tirer des parodies d’idées (qui sont des fantômes), mais jamais une idée véritable. Atteindre à cette clarté, c’est, forcément, se faire comprendre ». Ainsi s’exprime le peintre au cours d’un discours intitulé « Mon point de vue ». Propos publiés en octobre 1949 dans The Tiger’s Eye. De cette époque datent les grandes toiles lumineuses. Violet, Black, Orange, Yellow on White and Red ; N° 4 [Yellow, Black, Orange on Yellow], 1953 ; Untitled [Red, Black, Orange, Yellow on Yellow], 1953. De ces œuvres au « chromatisme contrasté », Rothko évolue vers d’autres grandes toiles dont les tons voisins, de plus en plus sombres, créent une véritable instabilité visuelle. Four Darks in Red, 1958 ; Dark over Brown n°14, 1963. Dans le même temps, Rothko réalise des œuvres monumentales, commandes de collectionneurs. Décorations murales pour la salle à manger de l’université de Harvard ; ensemble de panneaux pour la future chapelle de l’université Saint-Thomas à Houston. « Lieu de culte interconfessionnel », la chapelle Rothko sera consacrée le 27 février 1971, un an après le suicide du peintre (le 25 février 1970 à New York). Mark Rothko est enterré à North Shore, sur le détroit de Shelter Island. À la pointe de Long Island. Angèle Paoli D.R. Texte angèlepaoli |
MARK ROTHKO Mark Rothko dans son atelier, v. 1964, © Hans Namuth Estate Source ■ Voir aussi ▼ → les pages du site de la Tate Modern (Londres), consacrées à l'exposition Mark Rothko (26 septembre 2008 - 1er février 2009) → le site de Geneviève Vidal sur Mark Rothko - (sur le site de la National Gallery of Art, Washington) les pages consacrées à Mark Rothko |
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Oh, comme je suis heureuse de le rencontrer ici. Je me souviens de mon émotion en 1999 au musée d'Art Moderne de la Ville de Paris. Il y avait peu de monde, en cette fin d'après-midi, et j'étais là, toute petite devant ces grandes toiles qui vibraient. J'ai fait le vide en moi pour qu'elles occupent tout l'espace de mes yeux et de ma pensée et c'est venu comme une incandescence, ça fondait, se mêlait et s'élevait jusqu'à déborder de la toile et gagner l'air qui en était tout palpitant. C'était une osmose, j'entrais peu à peu dans cette peinture, dépassais sa douleur et cela devenait comme une inclinaison devant trop de lumière. Il fallait baisser les yeux et ouvrir le coeur et l'indicible surgissait des fonds superposés, traversait les masses sombres pour dialoguer avec les rouges somptueux, les ors liquides. Un théâtre antique... Les rouges s'assombrissent et génèrent des gris, variations aériennes, lumière voilée... chute dans les blancs d'ossements... Silence... expérience totale du silence de la peinture de Rothko. Entrée dans une profondeur illimitée sans profondeur picturale. Le temps s'effaçait. J'ai souffert devant l'assombrissement progressif de ses couleurs. Tout devenait impénétrable et je restais en rade, alors, j'ai grimpé jusqu'à la bande blanche tout en haut pour comprendre. Dis, Rothko, elle est où la paix, maintenant ? Seul le silence m'a répondu... Destinée... Il refermait la peinture sur elle-même et j'ai eu l'impression de lui fermer les yeux...
Merci, Angèle
Rédigé par : Christiane | 27 septembre 2008 à 21:41