DANS LE RAYON FOU QUI T’AVEUGLE
Ph., G.AdC
Vivre sans est-ce si difficile jour après jour avec patience reconstruire l’ordre immuable des choses réapprendre le silence les gestes de l’oubli les paroles apaisées allégées du trop plein des mots ranger l’autre que l’on a aimée la coucher la plier sans faux plis aux côtés de ceux qui ont déjà place dans ton cimetière intérieur peau contre peau regarder luire le soleil sur le blanc des rouleaux écouter bruire la vague sans souffrance perdre de vue sa voix et pour toujours rêver avec le cormoran blanc qui passe ailes éployées le long du corps puis immobile dans la passe s’arrimer aux branches et au vent être seule à seule avec soi sans témoin mille grains serrés de l’espace seule avec cette éternité-là et le ciel que faire d’autre sinon se taire pour mieux l’entendre respirer rire rêver de toi peut-être l’imaginer levant les yeux de son livre défaire du bout des doigts le papier du cadeau qui attend sur le lit la tendresse peut-elle survivre à la mort de l’amour la vague drosse l’ourlet de la plage chahute les galets roulés infinis une mouette traverse le ciel plonge plus rien à dire après tant de mots échangés plus rien à dire pareil à rien colle ton oreille dans le sable entre cailloux et menus grains écoute la mer mugir pour toi là-bas au fond des abysses d’où elle vient fais-toi cœlacanthe et dors de résignation d’épuisement de chagrin et quand tu seras proche de re-naître monte vers le ciel et la pleine lumière ta terre est là consolatrice qui te berce laisse-toi prendre dans le rayon fou qui t’aveugle de sa blancheur d’hiver les algues les algues te font une litière où la lumière pleut laisse-toi gagner par son sel qui lèche sous ta peau s’insinue sous tes épaules au creux de ton oreille c’est là qu’elle aimait te trouver qui lui rendra vie un jour elle se dit ai-je réussi à tout lui dire comment tout dire quand chaque mot est duplice le mal est fait sèche tes larmes la vraie lumière est sous tes pas.
Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli
Ph., G.AdC
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...réapprendre le silence les gestes de l’oubli les paroles apaisées allégées du trop plein des mots ranger l’autre que l’on a aimée la coucher la plier sans faux plis aux côtés de ceux qui ont déjà place dans ton cimetière intérieur peau contre peau...
Gorge serrée, en apnée, d'une traite, la lecture de ce texte m'a laissé un goût de cendre. Très beau, Angèle.
Je me sens proche.
Rédigé par : agnès | 10 décembre 2007 à 16:50
Ce texte a quelque chose de bouleversant. Il est ouvreur de mémoire, tel un talisman il projette à l'aigu du temps qui passe.
Coup de foudre pour ce texte!
Rédigé par : tissiane | 10 décembre 2007 à 23:17
"les algues|les algues|te font une litière |où la lumière pleut" |Le dormeur de la mer|la mort de l'amour |AMOR sans N | ROMAN | Envie de hacher les phrases après les avoir lues - oui- en apnée|Besoin de respirer|de ponctuer|de prendre goulée d'air|ne pas me noyer|mais me laisser emporter par votre houle|
Rédigé par : Ellise | 10 décembre 2007 à 23:28
U CANTU/CONTRE LES BRIS DE MER
Poncée jusqu'à point d’os la mémoire explore
et déplore en éclats d'incroyables ressacs.
Implacables coursives ventées et qui découpent
à vif, la peau tannée par l’ongle des détours.
Saccages laminés par les vagues d'ici.
Loin, trop loin, sous l'hiver et l'odeur des feux sus.
Des regards se rengorgent à l'intérieur du ventre.
Tout est net et tranché, sacrifié et sacré.
L'eau désormais s'effrite insensée, arrogante,
ourlée de faux répits, régentée de missives,
toutes autant illisibles, que tiédies et muettes.
Attendre et qu'elle tombe en lueurs consolantes ?
Vous n'aviez pas touché la douleur à son rythme.
Elle berce l'image comme une barque innée.
Elle revient à quai sans cesse et puis s'estompe.
Une amarre invisible la tient sans la brider
en cette offrande à mains
tendue au bord des yeux.
***
Rédigé par : Mth P | 11 décembre 2007 à 07:20
En écho, ce vieux texte de moi...
Va doucement, petite sœur.
N'ouvre pas trop grand la porte. Ne la referme ni trop vite ni trop fort.
Va doucement, j'ai essayé toute la journée de rassembler les fragments de mon âme. J'ai essayé de mettre bout à bout des mots qui diraient ce qui vibre et vrille et m'abîme.
Va doucement.
Marche, si tu le peux, sur la pointe de l'âme. Ne parle pas ou parle peu.
J'ai tenté toute la journée de chanter. Ce soir, je suis lasse. Mes mots sont bloqués par un courant d'air si froid que j'en ai les lèvres gelées.
Parle-moi doucement, petite sœur.
J'ai le vague au cœur, une impression d'incomplétude, de vacuité qui me soulève l'âme. Je n'ose plus nouer mes pensées aux mots qui traînent et me tourmentent. Repousse avec moi le temps. Empêche-le de m'atteindre.
Parle doucement.
Je me tiens aux cordages mais je ne les vois pas. Je me tiens aux cordages qui n'existent peut-être pas, peut-être plus... Faut-il que je sois fragile ce soir pour que mon souffle s'émiette ainsi, pour que ma voix s'étrangle et me semble étrangère !
J'ai si froid au-dedans…
Rédigé par : agnès | 11 décembre 2007 à 13:05
je viens de découvrir ce merveilleux texte, Angèle, qui m'a fait beaucoup de bien. Merci!
Rédigé par : Ouchy | 11 décembre 2007 à 18:25
Douce Angèle, c'est peut-être ces mots-là que je souhaitais lire, ils sont ce que je ne sais plus dire... Et c'est un grand bonheur que de parcourir cette page si magnifique.
Merci, je t'embrasse de plus grand coeur
Lisa
Rédigé par : lisa | 19 décembre 2007 à 19:06
merci pour ce texte...
vos paroles ont tellement d'écho en moi...
Rédigé par : andrée wizem | 20 décembre 2007 à 07:20