Le ciel sur les hauteurs a l’éclat d’une rose qu’on cueille. Le vent siffle, murmure. Une plume d’oiseau tombe de feuille en feuille. Et, sans un mot, dès le matin, je me lève et adresse mes pas Vers un jardin que je connais, que le soleil n’ignore pas ! L’herbe est moins noire. C’est le jour. C’est l’ultime gelée. J’offre ma bouche vide à la nuit qui fut vaine et salée ! Le vent m’incite à tout sentir comme un triomphe ou comme un don, À me confondre avec le jour, puisque le jour est bon, Puisque j’ai découvert, posté sur le seuil d’une grange, Un grand arbre, qui me domine, qui sous sa puissance me range ! La mer au loin s’emporte et les rocs baveront son courroux. L’âcre brume des prés voile très doucement le ciel teinté de roux. L’air se réchauffe quand je souffle ! Et le vent perpétue, Il fait sonner, sur les chemins, une parole que j’ai tue. La marée envahit les champs par lesquels j’allais et venais, Entremêle des bouts de corde ou des lambeaux de harnais, Courbe avec majesté l’herbe qui brillera dans l’aube printanière ! Et tandis que le jour apparaît au milieu d’une ornière, L’on peut entendre, qui recommence et roule à l’occident, Le sombre orage que j’augurais en contemplant le ciel ardent ! Pierre Oster, La Grande Année, Gallimard, Collection Blanche, 1964, in Anthologie du XXe siècle, Gallimard, Collection Poésie/Gallimard, 2004, pp. 418-419. |
PIERRE OSTER (1933-2020) ■ Pierre Oster sur Terres de femmes ▼ → La Grande Année, Dix-neuvième poème(+ une notice bio-bibliographique) → Un nom toujours nouveau, Treizième poème |
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Comme c'est Claudel, Paul, tout admiré ! J'ai rencontré Pierre Oster à Sens quelque dix années plus tard, il disait somptueusement ces vers longs embrassés. J'ai frémi, je n'ai pas fait pareil... Que chacun, en poésie, fasse bien ce qu'il a à faire, et la poésie sera diverse et belle.
J.-M.
Rédigé par : Jean-Marie | 24 novembre 2007 à 22:18
Ah, Jean-Marie, quelle belle découverte que ce poème de Pierre Oster. J'ai l'intention de me plonger tout prochainement dans les oeuvres de ce poète, dont la phrase, le rythme, les images, me parlent aujourd'hui intensément. C'est vrai, il y a quelque chose de claudélien dans ces vers (versets ?). Mais Claudel, hélas, n'a pas le vent en poupe - vous le savez-, il est même plutôt mal vu. Sa langue, pourtant, est, elle aussi, d'une ampleur incomparable !
Rédigé par : Angèle Paoli | 24 novembre 2007 à 23:11
oh non ! beau cadeau là pour ma journée, mais pas en l'associant à Claudel (avec lui je cherche d'instinct la fabrique), pour Pierre Oster
Rédigé par : brigetoun | 25 novembre 2007 à 12:34
Pierre Oster sera présent à l'homme à Joë Bousquet qui sera rendu par la http://www.m-e-l.fr/presentation.php>Maison des écrivains et de la littérature le mardi 18 décembre à 19h00.
SGDL
Hôtel de Massa
38, rue du Faubourg-Saint-Jacques
Paris 14e
métro : Port-Royal
Entrée libre et gratuite
Rédigé par : Agenda culturel de TdF | 11 décembre 2007 à 18:18
Je suis toujours effaré de voir comparé un poête à un autre. Certes Pierre Oster a, vu de la terre sur fond de ciel, une envergure qui dépasse dans le temps et l'espace celles de Claudel et de Saint-John Perse, principalement, parce qu'il dégage une humeur, une universalité bien austérienne. Je dirais qu'il y a quelque chose de bien austérien en la poésie de Pierre Auster.
Rédigé par : CHENET Gérard - Espace culturel Sobo Badè | 22 juin 2008 à 16:39
Que Pierre Oster puisse être situé dans une tradition poétique donnée ne me pose pas de problème puisque c'est le poète lui-même qui s'en réclame.
Par ailleurs, je suis moi-même effaré de voir régulièrement nos poètes mutés en "poêtes". Pourquoi tant s'obstiner à les cantonner dans un répertoire "à la Bourvil" ?
PS Où peut-on se procurer les ouvrages austériens de Pierre Auster ? Un poète que je n'ai pas eu encore le bonheur de rencontrer. C'est un Indien Guayaki vivant à Brooklyn ?
Rédigé par : Yves | 22 juin 2008 à 18:22
bonjour
je remercie mon frère Athanase qui m'a permis de découvrir cette beauté du verbe simple, profond et plein de sens que vous véhiculez avec respect et sagesse... merci.
mouloudi mustapha
Rédigé par : mouloudi mustapha | 29 juin 2013 à 16:22