Ph., G.AdC L’INTERVALLE […] Venus de plus loin que l’enfance À bout de départs et de retours De chutes et d’assauts Nous basculons dans la blancheur unanime Ni sanglot Ni amertume Pas même un bruissement Mais l’intervalle. Nous nous réveillerons peut-être En une danse de sable À l’écart de nous-mêmes Avec un visage anonyme L’éternité au fond de la gorge. Nous revenons de tant de comas De la conjonction des voix et des silences Du lointain et du proche De ce lieu où quelqu’un marche Si léger, si invisible Qu’il traverse nos murs de part en part Sans égratignure Ou lézarde. Nous revenons du temps inhabité À l’écoute du fruit Au cœur d’une saison sans tumulte Nous céderons aux rescapés La respiration pathétique des montagnes. D.R. Nohad Salameh Nohad Salameh, « L’intervalle » (extrait), in Siècle 21 n° 11, Écrivains libanais d’aujourd’hui, automne-hiver 2007, pp. 46-47. ________________________________________ Nohad Salameh est née à Baalbek (Liban) en 1947. Après une carrière journalistique dans la presse francophone de Beyrouth, elle s’est installée en 1989 à Paris. Fille du poète en langue arabe Youssef Fadl Allah Salameh et épouse de l'écrivain et poète Marc Alyn, elle a publié une quinzaine d'ouvrages, parmi lesquels Les Enfants d'avril (Le Temps Parallèle, 1980), Folie couleur de mer (Le Temps Parallèle, 1983), L’Autre Écriture (Dominique Bedou, 1987 ; prix Louise-Labé 1988), Chants de l'avant-songe (L'Harmattan, 1993), Les Lieux visiteurs (Cinq continents, L'Harmattan, 1997), La Promise (Cinq Continents, L'Harmattan, 2000), La Revenante (Voix d’Encre, 2007), Baalbek : les demeures sacrificielles (Éditions du Cygne, 2007), Passagère de la durée (Éditions PHI/Editpress, 2010) et D’autres annonciations, poèmes 1980-2012 (Le Castor astral, 2012), Le Livre de Lilith (Atelier du grand Tétras, 2016), Marcheuses au bord du gouffre (éditions de La Lettre volée, 2017). Membre du jury du Prix Louise-Labé, Nohad Salameh a reçu en 2007 le Grand Prix de Poésie Louis-Montalte, décerné par la Société des Gens de Lettres (SGDL), pour l’ensemble de son œuvre. |
NOHAD SALAMEH ■ Nohad Salameh sur Terres de femmes ▼ → L’écoute intérieure → L’envol immobile → Marcheuses au bord du gouffre (lecture d'AP) → Les nudités premières → Plus neuve que la mort (poème extrait du Livre de Lilith) |
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Merzouga
Le désert a arraché
la semelle de mes pieds
Nous en avons perdu jusqu'à nos traces
Seul
l’arbousier
a retenu l’instant de ton baiser
sur sa branche la plus haute
au pied des grandes dunes
d’où les têtes dépassent
comme décapitées
Combien de têtes coupées,
pour ce bel amour ?
Combien de joues
brûlantes de sueur
et de pieds écorchés ?
Et la distance des traces balayées,
qui la retrouvera
sur la branche plus haute
de l’arbousier penché
au pied des grandes dunes
d’où les têtes dépassent
comme décapitées ?
Et pour ce bel amour,
combien de corps enfouis ?
Et à ce bel amour
combien de jours,
combien de nuits ?
Un salut chaleureux, et un peu humide, de la Toscane,
Emilie
Rédigé par : Emilie Delivre | 17 septembre 2007 à 13:53
QADISHA
Mes pas avalent le sable et dérobent les chemins. Ils, savamment égrenés, se glissent dans le passage coulant sur les grands pans des anciens rêves. Sur mes talons la profonde Vallée Sainte fuit l'entonnoir de la rancune humaine; du bâillon des armes pend encore la morsure du dernier souffle dans la poussière.
J'arpente, dans le matin tiédi, mes mains au soleil jusqu'au détour d'une fausse nuit élégante: sous le grand rocher pendu comme un lambeau de chair blanche sous la chênaie et l'olivier.
En cavale jusqu'au cirque obturé d'un large et frais bouchon de cèdres, j'agrippe le profil lourd de la Terre des Saints.
Alors, mes pensées empruntent le bleu insidieux, la courbe des prières où bute l'espoir aux portes de l'abîme.
Oh souvenirs si présents!
Rédigé par : kerdraon | 02 juillet 2008 à 18:24