D.R. Ph. Jean-Marc Tomi
Source
Vizzavona, 5 août [1923].
Admirable Monte d’Oro ; une des plus belles cimes que j’aie vues. Grande course ce matin; atteint la crête qui fait face au mont, puis redescendu dans l’étroite vallée peuplée de pins d’une variété inconnue, qui ressemblent à des cèdres et donnent au paysage un aspect chinois. Baignés à deux reprises dans des vasques profondes, en suivant le lit du torrent. Ah ! que je me sentais moins jeune qu’à vingt ans !
6 août.
Ascension du Monte d’Oro. Mais nous le prenons trop à droite et n’atteignons pas le sommet principal. Après une épuisante montée au soleil, nous perdons le sentier, qui s’enfonce dans un champ de neige. Plus d’une heure durant, nous escaladons des roches et parvenons assez péniblement à un col très étroit, de l’autre côté duquel nous avons la surprise de nous retrouver exactement en face de l’hôtel. Il est trop tard pour repartir à neuf, et nous sommes trop fatigués. Descente assez amusante sur les dalles de granit en pente; puis éreintante, après qu’on a rejoint la forêt, à travers les fougères et les aiguilles glissantes des pins. Nous rentrons à 7 heures et demie ayant marché douze heures sans arrêt, fourbus, extrêmement amusés par la montagne. Pas un instant le paysage ne nous a payés de nos peines. Baignés trois fois en cours de route.
7 août.
Vizzavona à Corte. Été en auto particulière à Piana (merveilleux). Premier village vraiment corse. Baie de Porto, où l’on eût voulu se baigner ― très bel emplacement pour un camping.
8 août.
Corte. Piana. Retour à Ajaccio par l’auto publique. Admirable longée de la mer. Un court arrêt à Sagone ; juste le temps de me plonger dans l’eau la plus tiède et la plus transparente. L’auto repart, après laquelle je cours sans avoir pu prendre le temps de me revêtir.
9 août.
Départ pour Nice à 9 heures du matin. Hier soir, à Ajaccio, nouveau bain dans une mer malheureusement assez sale. Enfants rieurs, dans la cabine voisine, qui me laissent les regarder longuement, amusé de leur impudeur ― eux amusés de mes regards. Tous deux déjà formés, de corps parfaits, l’un blanc, l’autre bronzé. Ils changent entre eux de costume.
Rien de tel que l’ennui pour flétrir un visage.
André Gide, Journal, Tome I, 1887-1925, Éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1996. In Le Goût de la Corse, textes choisis et présentés par Jacques Barozzi, Mercure de France, Collection Le Petit Mercure, 2007, page 39.
Un salut
J'ai vu la Corse su Rai due.
Niente male.
Di Gide lessi il Viaggio al Congo.
A me basterebbe visitare la Corsica.
Ciao
Alfred
Rédigé par : alfred | 10 août 2007 à 21:11
Merci pour ces fragments du Journal de Gide, je ne les connaissais pas.
Aux Pays-Bas, on a récemment traduit une partie de son Journal.
Rédigé par : Quinten Jiskoot | 15 août 2007 à 23:25