L’Île-Rousse, Samedi 17 juillet 1909
Bientôt le port de Saint-Florent est en vue, arrimé à sa citadelle et blotti au creux de sa rade de sable. Nous passons au large, pressés de mouiller dans le port de l’Île-Rousse. Louis de Beaujeu me raconte que dans les eaux du golfe gît un galion espagnol du XVIe siècle, englouti dans les fonds sablonneux avec tous ses trésors :
- Les portulans de l’époque signalent l’endroit approximatif du naufrage. Quelque part au large de la punta Mortella et de la punta di Curza. Mais les recherches entreprises sous les ordres de mon ami Alfred, le ministre de la Marine, n’ont pas abouti jusqu’à présent.
Je brûle d’en savoir davantage et je presse Louis de questions :
- Quel était le nom du galion ? Que transportait-il ? Où allait-il ? Comment a-t-il fait naufrage ?
Louis reste très évasif. En réalité, il ne sait pas grand-chose :
- Je sais seulement que le galion, parti de Gênes, faisait route vers l’Espagne. Mais j’ignore les raisons du naufrage. Ni pourquoi il se trouvait dans les eaux du golfe. Le galion faisait probablement partie de la flotte du vieil amiral Andrea Doria, qui combattait pour Gênes contre Sampiero Corso. Il est vraisemblable qu’il a été arraisonné par des pirates. Même si certains de mes amis pensent qu’il a tout simplement été surpris et mis à mal par l’une de ces folles tempêtes qui sévissent parfois brusquement au large de l’île.
Louis barre sereinement, attentif à éviter les récifs des Agriates. L’Île-Rousse se profile enfin, précédée par les senteurs entêtantes du maquis qui parviennent jusqu’à nous. Bientôt l’îlot grandit et se change en un énorme rocher aux couleurs flamboyantes. Là, dans les anfractuosités et entailles nichent des myriades d’oiseaux qui se partagent le territoire et se régalent de poissons et de petits crustacés.
Mais la cité paoline est enfin là, qui balance ses palmes sur les hautes façades et somnole au soleil, langoureuse et paisible. Il me tarde de mettre pied à terre et de découvrir les attraits de ce tout jeune port de Corse !
SUITE, LE TOUR DE CORSE À LA VOILE, 11
RETOUR VERS L'AVANT-PROPOS de ce Journal de croisière de la Belle Époque
Ici, sur l'île, une maison et un jardin, des myriades d'oiseaux et le ciel bleu ce matin.
Ici, la mer est calme et reposée.
Je la contemple de la fenêtre et elle m'emmène dans des rêves toujours plus beaux, plus loin chaque jour.
Je ne prendrai pas le bâteau qui est arrimé au port.
Je préfère que mon esprit vagabonde derrière la fenêtre et que la mer l'emmène encore plus loin tous les jours.
clem
Rédigé par : clem | 17 février 2007 à 09:56