Ph., G.AdC
RIEN SUR NOIR
Aujourd’hui Rien
rienrienrien
rien lu rien fait rien qui vaille rien écrit
rien non rien
rien va
elle se sent môme néant
rin
pensé à rin sinon à la hâte de la fin du jour
noir le jour
sombre sombre elle sombre noir en plein jour
lumière gris sur noir
noir toujours plus noir
Et ce rêve en fin de nuit
Ce rêve qui t’a mis un goût de bave calcinée dans la bouche
Loches, loches géantes, striées de rainures orange piquetées de brun
Loches dodues qui se mettent à ramper vers toi Vite toujours plus vite jusqu’à ce que te gagne l’affolement et t’épuise l’angoisse. Échappée belle de l’une d’elles, plus hargneuse, plus rapide qui grimace ses ondulations. Elle active les dents qu’elle cache sous son ventre. Elle hérisse ses viscosités. Elle se propulse vers toi par soubresauts. Elle se rapproche de toi. Elle te guette. Ses adhérences pointues t’agrippent. Tu hurles. Ton cri muet t’étouffe. Tu tentes de prendre la fuite. Tes yeux refusent de s’ouvrir. Tu ne sais quelle direction prendre, vers quelle lumière diriger tes pas. La limace s’enfle, se gonfle, irradie l’espace de ses spasmes. D’autres surgissent. Une armada orange et grise qui suinte de mille pores en alerte. Elles gagnent en individualité, dégagent leurs masses. Leurs antennes crochues te cherchent. Attirées par l’odeur de ta peau, elles fouillent l’espace. Tu recules, pétrifiée. Tu tâtonnes dans le noir. Tes yeux bandés ne laissent filtrer aucune particule lumineuse. Tu sens ton corps perdre ses formes. Ses limites fondent. Il ne reste bientôt de ton devenir qu’une flaque molle, visqueuse et vide. Tu te regardes en train de te dissoudre dans les interstices du sol. Te voilà absorbée entière. Seule ton invisibilité t’appartient encore.
Un noir intense descend sur la mer. Brouillard dense qui engloutit la marine prise dans un entonnoir. L’étau des rochers se resserre. Les eaux du ciel absorbent les flux de la mer. Ensemble elles se rejoignent, progressivement se fondent les unes dans les autres. Nappes de gris uniformément gris sur nappes lisses plus foncées. La bande de mer rétrécit à vue d’œil. Seule persiste encore la blancheur des crêtes émergeant des flots. Ultime frange de lumière.
Angèle Paoli
D.R. angèlepaoli
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Angèle, c'est trop noir, c'est décourageant !!!
Je me suis acheté un petit cyclamen dans un pot. Ses feuilles sont vert foncé, ses fleurs rose pâle, il me rappelle la Corse.
Rédigé par : Ouchy | 24 novembre 2006 à 17:02
Mais Uschi, ne sois pas inquiète, ce n'est qu'un orage passager. Cette mer et ce ciel, ça m'inspire.
Et puis, pour pouvoir goûter le calme et la plénitude, il faut aussi qu'il y ait des moments comme ceux-là. C'est tellement beau et fort l'orage et après, lorsque la pluie est tombée, ça sent la mousse et la terre mouillée, c'est une vraie fête des sens. Merci pour le petit cyclamen rose et vert que tu as mis sur les rebords de ta fenêtre. Je le vois d'ici. Il est très très gracieux, très gracile. Prends soin de lui et de toi.
Rédigé par : Angèle Paoli | 24 novembre 2006 à 22:10
Un texte qui m'a angoissée à la première lecture... pourquoi ? En le relisant, j'ai apprécié l'intensité du phénomène. Il n'empêche que quelques frissons... Brrrrrrr ! Je n'aime pas l'orage !
Des journées à la môme néant, j'en vis, moi aussi. Elles sont très rares. Heureusement.
...On pourrait étreindre
le fragile
éphémères papillons de neige
baiser d’un fruit pulpeux
mousses embuées
point de mer où
le vent s’arrête…
Je pense à toi, Angèle.
Rédigé par : nobody | 28 novembre 2006 à 12:53
Bonsoir, Agnès. Merci pour ta présence réconfortante. Connais-tu L'Amateur d'escargots de Patricia Highsmith? Je t'en recommande la lecture! BRRRR....
Rédigé par : Angele Paoli | 30 novembre 2006 à 16:38