Ph., G.AdC
« depuis seul
devant
l’océan vide
notre petit galet
calculé au
cœur
du papier
sa sem-
blance
conversations
et jeux
éphémère mortalité »
Martin Ziegler, Comme il en irait du venir en souffrance, Éditions L. Mauguin, 2005, s.f.
LE « PAYS HAPAX » DE MARTIN ZIEGLER
Énigmatique, la poésie de Martin Ziegler traverse l’espace aérien de la page, à peine effleuré par les mots. La voix singulière du poète se saisit subrepticement de l’absence des signes et d’un temps sans image.
Comme il en irait du venir en souffrance. Doutes et suspensions, murmure, attente-désir d’une souffrance qu’aucun mot à venir ne peut traduire. Annoncée dans le titre et suspendue dès le premier poème, la souffrance se lit en filigrane dans le recueil sans pour autant se dire, se nommer. Le poète, du reste, se situe volontiers du côté de « l’innommé », de « l’impensable », de « l’intouchable ». De « l’invisible » et de « l’illusoire ».
Pourtant, dans une dominante d’hiver et de neige, se dessine, dans le blanc de la page, le paysage intérieur du poète. Un « pays hapax » fondé sur les silences et les vestiges plutôt que sur les images. Imprécises. Insaisissables.
Poésie des déplacements ténus, glissements des sons et des sens, rencontres d’où surgissent des mots rares, la poésie de Martin Ziegler, délestée du poids de la subjectivité, est une poésie du retrait et de l’effacement –
rien
à porter
dans l’écriture –
Rien, si ce n’est ce souffle à peine, pris dans sa force fugitive ; cette flèche, rassemblée dans son épure. Rien : si ce n’est un éclat.
Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli
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Ziegler, traducteur-poète, est un passeur de textes. Ici, cette extrême économie de mots, cette concision sont celles d'un Haïkou.
Haïkou-caillou, évoquant la matérialité symbolique du langage qui confronte l'être à son désir, à ses déserts, à son desêtre...
Ce caillou de Martin Ziegler me rappelle un peu ceux de Molloy :
« Et la solution à laquelle je finis par me rallier, ce fut de foutre toutes mes pierres en l'air, sauf une, que je gardais tantôt dans une poche, tantôt dans une autre, et que naturellement je ne tardais pas à perdre, ou à jeter, ou à donner, ou à avaler. »
Samuel Beckett, Molloy
Amicizia
Nadine
Rédigé par : Nadine Manzagol | 27 novembre 2006 à 06:24
Pour mieux répondre à ton commentaire, ma chère Nadine, j'ai choisi d'écrire en contrepoint LE « PAYS HAPAX » DE MARTIN ZIEGLER, que je mets en ligne à l'instant ci-dessus.
Amicizia
Rédigé par : Angèle | 01 décembre 2006 à 00:04
"Rien" ? Vague intuition, pourtant incontournable : Rien peut-il se concevoir ?
Plutôt ne serait-ce pas un retrait, une séparation ponctuelle d'avec l'idée de totalité (au sens du Tsimtsoum hébraïque) ?
Un poète comme Ziegler qui s'est tant soucié de traduire d'autres oeuvres magistrales (Hannah Arendt, René Char...) peut vouloir revivifier la parole en la portant jusqu'à son seuil initial. Laissant ainsi le vide indéfini être. S'exprime alors - comme tu le dis justement - par ce retrait même, la force du souffle qui fait résonner ce vide et essaime les éclats de la totalité (dont on est alors séparé) vers des reformulations, des ré-créations originales.
Est-ce ce que tu suggères ?
Car il me semble bien que cette pratique de l'acte poétique du retrait vers d'autres formulations t'est également familière.
Rédigé par : Alphea | 01 décembre 2006 à 07:31
Pour cette fin d'année 2006,
les éditions L. Mauguin présentent le travail de cinq artistes :
Michèle Clancy
Anne-France Frère
Annick Ranvier
Paule Riché
Martin Ziegler
exposition
dessins originaux - petits formats
32 dessins exposés, réalisés au pastel, au fusain, à l'aquarelle, à l'encre de Chine, à l'huile, sur papier ou sur bois, 32 petits formats pleins de lumière, de couleurs et de nuances.
14 décembre 2006 - 9 janvier 2007
horaires :
lundi 15h-19h / mardi au vendredi 10h30-13h 14h30-19h/samedi 15h-19h
[fermé du 23/12 au 26/12]
éditions L. Mauguin
poésie contemporaine
1, rue des Fossés-Saint-Jacques
75005 Paris
tél : 01 40 51 71 54
Rer B-Luxembourg bus 21, 27, 38, 84, 89
Rédigé par : Agenda culturel de TdF | 19 décembre 2006 à 11:57