Aquatinte numérique originale, G.AdC
« […] il est des îles heureuses où les tornades sont des rafales d’épices
Il suffit que le sel noir s’accroche aux falaises, les voilà feux d’argent pour des navires mourant…
La mémoire ne doit pas refluer ses fers rouges et ses fouets sanguinaires sur le sable innocent.
Avant la pondaison des contrats d’espérances, une route balafrée au chalumeau des lunes portera la croix jaune des germes de moisson nourris à l’engrais neuf des cœurs noués ensemble.
Ma liberté est souffle déserté de ma chair
éblouie de mes morts, des chavirements de nuit.
Qui suis-je ? L’exil est peut-être mon nom,
graîne scutellaire ralliée à tous les hémisphères.
Un bout de désert collé à mes saignées, je suis femme de mauvais soleil, J’ai scellé à ma terre le sphinx du partage, ma cellule restera cette pâture d’îles craquantes, mare de nuits ocreuses qui dénie le silence, et l’occis pour entendre au large du grand désastre, le cri du sel âcre.
Cieux, terres, marées de frissons vertes, au-delà de l’angoisse, des climats sans nuisances s’ajustent aux feulements d’amours nues et féroces. »
Nadine Fidji, Je suis seul, Éditions Le Carbet, 2004, page 23.
Note : Le recueil Je suis seul est dédié à Raúl Rivero, poète cubain incarcéré en mars 2003 (après avoir été condamné à 20 ans de prison), dans la prison de Canetelas à Cuba. Et à Blanca Reyes, sa femme. Raúl Rivero a été libéré pour raisons de santé le 30 novembre 2004.
Voir/écouter aussi : - (sur Terres de femmes) Nadine Fidji/Le sel des hautes brumes (+ notice bio-bibliographique) ; - (sur Terres de femmes) le Portrait de Nadine Fidji dans la Galerie Visages de femmes ; - (sur Radio-Canada) entretien (29 avril 2006) de Anne Godin avec Myriam Cyr et Nadine Fidji. |
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Pour prolonger ces beaux accents "d'il est des îles heureuses", je vous donne la fin d'un texte inédit que j'ai intitulé "l'inconforme", dédié à Raúl Rivero...
"Me salvo
Porque hago un cisne de sombra en la pared
Y le cuento la vida de Rubén Darío.*
Je me sauve
Parce que je fais un cygne d’ombre sur le mur
Et je lui raconte la vie de Ruben Darío
Je me sauve en riant de ce Dieu Barbu descendu il y a 40 ans de sa colline pour dicter au peuple cubain ses lois ses commandements et ses lubies et qui depuis surveille avec minutie si tout est bien conforme ou inconforme
Un jour il disparaîtra comme tous ses illustres prédécesseurs et l’Histoire loin de l’absoudre le dissoudra dans la médiocre folie des vieux dictateurs
Enseguida el poeta nos regala
Un alba de oro*
Alors le poète nous offre
Une aube d’or
jean-jacques dorio
* Raúl Rivero poème écrit depuis sa prison l’été 2003
Rédigé par : jjd | 12 mai 2006 à 21:48
Bien que totalement étranger - mais pas insensible, évidemment - aux univers que vous dévoilez par petites touches dans votre blog, je me dis qu'avec des blogs de cette qualité, on n'a pas encore mesuré l'impact des blogs : où aurait-on connaissance de ces noms, de ces photos, de ces poèmes ?
En tant que nouveau blogueur, je suis effaré de l'insignifiance de la plupart des blogs écrits ("je" ceci, "je" cela...) alors que les blogs de poésie et de photographies sont parfois exceptionnels.
Mais comme je n'ai pas ces talents-là, ce fut un plaisir de découvrir le vôtre.
Rédigé par : L'Abrincate | 28 mai 2006 à 11:51