Aquatinte numérique, G.AdC TOUTE FLEUR QUI S’OUVRE Toute fleur qui s’ouvre, on dirait qu’elle m’ouvre les yeux. Dans l’inattention. Sans qu’il y ait aucun acte de volonté d’un côté ni de l’autre. Elle ouvre, en s’ouvrant, autre chose, beaucoup plus qu’elle-même. C’est pressentir cela qui vous surprend et vous donne la joie. Alors même qu’il vous arrive désormais, par instants, de trembler, comme quelqu’un qui a peur et qui croit, prétend ne pas savoir pourquoi. Philippe Jaccottet, « Aux liserons des champs », Et, néanmoins, Gallimard, Collection blanche, 2001, page 77 in Guy Goffette, Petit printemps portatif (anthologie hors commerce), Gallimard, 2002, page 18. |
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"Foresta marina all'aurora,
folta e inzuppata di vento,
io entro e soffoco in te."
da Appunti per la luce dell'alba
Philippe Jaccottet
Rédigé par : alfredo | 17 mars 2006 à 21:59
« Et néanmoins je dis encore, […] / mais en me forçant à parler, plus têtu / que l’enfant quand il grave avec peine son nom / sur la table d’école […]»
Procédant souvent du simple au complexe, d’une image presque anodine à une comparaison plus insolite, Jaccottet progresse par touches brèves et retouches successives, précise, affine, suggère, et débouche tout naturellement sur une zone d’ombre, qu’ensuite il lui faudra éclairer.
L’incipit de À la lumière d’hiver que j’avais envie de citer ici, à la suite de l’extrait que vous nous donnez à lire, propose un exemple tout à fait remarquable, de cette tension entre un récit encore inabouti si l’on veut, et par ailleurs, la construction rigoureuse de l’ensemble.
Tenant à égale distance l’affirmation et la négation, le poème reste en suspens. C’est entre ses lignes, qui se font et se défont, ou encore dans l’intervalle, que quelque chose peut apparaître.
La confrontation avec l’image ainsi, n’est jamais immédiate, mais différée, même lorsque dans les Carnets ou plus récemment dans les feuillets de Truinas, la perception du réel est presque toujours marquée par la circonstance, le circonstanciel ; temps qu’il fait, humeur de telle ou telle personne rencontrée, invite d’un chemin écarté.
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Ph. Jaccottet, À la lumière d'hiver précédé de Leçons et de Chants d'en bas et suivi de Pensées sous les nuages, Paris, Gallimard, 1994, p. 78. [Un extrait et une page que je cite de mémoire.]
[Sur l'affirmation, la négation et les tâtonnements de l'énonciation, consulter l'ouvrage de Michèle Monte] Mesures et passages. Une approche énonciative de l’œuvre poétique de Philippe Jaccottet, Paris, Honoré Champion, 2002, 436 p.
Rédigé par : Déborah Heissler | 17 mai 2007 à 20:02