ans l’ambitieux programme mis sur pied dans la capitale pour célébrer le « Printemps des poètes 2006 », j’ai choisi « Les traversées poétiques d’Andrée Chedid » à l’
, le jeudi 9 mars. Parce que j’aime le lieu, parce que j’aime et admire la Méditerranéenne Andrée Chedid. L'intitulé même de « traversées » m’a semblé d’emblée une promesse de fraternité et d'espoir, une invite à la rencontre et à la redécouverte d’une « femme plurielle », au lyrisme authentique et généreux, « figure fédératrice » de son siècle.
Andrée Chedid n’a pu être présente ce soir-là, mais de nombreux poètes de géographies et de sensibilités différentes étaient venus lui rendre hommage et célébrer sa poésie. Alternant la lecture de poèmes d'Andrée Chedid avec leurs propres poèmes, selon la convention établie pour cette soirée. Que, tout au long, le musicien
Fawzi Aleidy anima de la force méditative d’intermèdes aux accents d’orient. Mélancoliques et profonds.
© Thierry Rambaud/IMA
Jean-Pierre Siméon (le directeur artistique du Printemps des poètes) a ouvert la cérémonie par un hommage dénué de tout académisme et de toutes fioritures. Un hommage direct, chaleureux et « vrai ». Poursuivant son avant-propos par la lecture de deux poèmes choisis d’Andrée Chedid, puis de deux poèmes personnels, dont un extrait très émouvant de la
Lettre à la femme aimée au sujet de la mort. Avant d’accueillir
Vénus Khoury-Ghata, ardente porte-parole de la francophonie, qui célébra à son tour la « passeuse » Andrée Chedid d’une voix chaude et bouleversante, au bord des larmes, et lui dédia un large extrait de son propre recueil :
Quelle est la nuit parmi les nuits.
© Thierry Rambaud/IMA
Cette « traversée » de l’œuvre d’Andrée Chedid s’est poursuivie avec l’arrivée du poète et anthropologue algérien
Habib Tengour, qui, après l'évocation de quelques anecdotes personnelles, a lu des poèmes issus de sa propre création. Une poésie non dénuée de clins d’œil et d’humour, dont rendent compte les recueils publiés au cours de la dernière décennie :
Gens de Mosta (1997),
Le Poisson de Moïse (2001),
Traverser (2001),
La Sandale d’Empédocle (2003),
Gravité de l’ange (2004).
Poète et homme de théâtre,
Salah Al Hamdani est né à Bagdad, mais vit en exil en France depuis trente ans. Un exil déchirant, comme il ressortait des larges extraits de
Bagdad mon amour (Seuil, 2003) qu’il a lus d’une voix ronde et puissante, en arabe, puis en français, avant de céder la place à un autre Irakien,
Khadim Jihad, poète et universitaire, traducteur notamment de Jacques Derrida et de Jean Genet.
Avec l’arrivée du jeune poète marocain
Mohamed Hmoudane, la « traversée poétique d’Andrée Chedid » s’est à mes yeux provisoirement interrompue. Le jeune poète, arrimé poings serrés à sa propre création, a fait totalement l’impasse sur Andrée Chedid. Gommant par la même occasion l’esprit de cette rencontre. Et peut-être le pervertissant. Un poète pourtant très talentueux, mais sans concession aucune, dont la violence des images stercoraires et mortifères s’apparente à l'
écriture incandescente d’un Lautréamont ou d’un Pierre Guyotat.
Heureusement,
Issa Makhlouf, poète et essayiste libanais, docteur en anthropologie sociale et culturelle, a renoué le fil chaleureux de cette traversée, lisant aussi plusieurs poèmes extraits de sa propre œuvre, dont le dernier recueil,
Mirages, a été publié en 2004 aux éditions
José Corti.
C’est par une courte intervention radiophonique de Matthieu Chedid que s’est conclu l’hommage rendu à la grande dame. Le petit-fils a lu « vite fait » (selon sa propre expression) un poème, laissant un moment interloquée la toute sérieuse assemblée, finalement réjouie par cette pirouette juvénile inattendue.
Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli
© Photos Thierry Rambaud/IMA
Merci pour ce magnifique compte-rendu Angèle!
Rédigé par : Marielle | 11 mars 2006 à 20:21