Naissance au Caire, il y a cent un ans, le 20 mars 1920, d’Andrée Chedid. Image, G.AdC ENTRE NIL ET SEINE Dans les entretiens qu’a eus Andrée Chedid en 2005 avec Brigitte Kernel — entretiens publiés en 2006 aux éditions Belfond sous le titre Entre Nil et Seine —, Andrée Chedid explicite la double polarité qui est la sienne : cairote et parisienne. Elle retrace les moments marquants de sa vie de femme et d’écrivain, et esquisse avec beaucoup de tendresse et de simplicité les figures tutélaires de son passé. Tout en évoquant ses origines orientales : libanaises et damascènes. Ses ancêtres phéniciens étaient d’habiles commerçants, venus s’installer en Égypte, « terre d’asile », pour échapper à la misère. Autour de 1860. Les souvenirs d’une vie refont peu à peu surface. Une vie dont la figure la plus forte est Alice, sa mère. Une femme d’exception, dont — dans Les Saisons de passage — Andrée Chedid fait revivre la beauté et la fulgurance. Viennent ensuite la rencontre de la toute jeune fille avec Louis Chedid, le mariage, la naissance des enfants Michèle et Louis, le divorce,… mais aussi l’écriture. Le rapport privilégié de la femme à la vie et à la poésie. Une soif de créer qui lui vient d’Alice. Et qu’Andrée Chedid se réjouit d’avoir laissée en héritage à ses enfants et petits-enfants. Peu encline à se tourner vers le passé, porteur de nostalgies, Andrée Chedid livre par bribes, avec légèreté et humour, ce qui fait d’elle une femme heureuse. C’est un caractère doué pour le bonheur. Et décidé coûte que coûte à choisir le bonheur. Même si l’enfant est très tôt habitée par l’idée de la mort, sans qu’elle l’ait jamais approchée. L’enfance d’Andrée Chedid est une enfance choyée, vécue au sein d’une famille aisée. Marquée pourtant à l’âge de dix ans par le divorce de ses parents. De l’éducation reçue dans le milieu fermé du lycée et du pensionnat, elle ne garde pas de mauvais souvenirs. Elle riait beaucoup avec ses amies, et passait pour indisciplinée. Le départ brutal pour la France la coupe de ses racines, mais la souplesse de son caractère lui rend l’adaptation aisée. En réalité, Andrée Chedid n’a échappé à aucune des déchirures de la vie. Et sa sensibilité en a été durement éprouvée. Mais d’un tempérament bien trempé, l’épicurienne Andrée Chedid a résisté aux drames, aux secousses, aux tentatives de subordination. Engagée dans les combats de la vie et de son temps, Andrée Chedid l’est aussi dans l’écriture qui brûlait en elle. L’écriture, cet élan vital qui lui a permis d’être présente à l’autre et au monde. André Chedid est morte à Paris le 6 février 2011. Angèle Paoli D.R. Texte angèlepaoli |
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J'ai eu le grand plaisir de rencontrer Andrée Chedid il y a maintenant deux ans lors d'un salon littéraire et je voudrais ajouter à ce fort intéressant commentaire d'Angèle que cette vieille belle dame garde dans ses yeux une espièglerie et une intelligence hors du commun et qu'elle s'offre de plus le plaisir de séduire son auditoire avec, et vous pouvez me croire, une nette prédilection pour ses admirateurs masculins.
J'admirais la poète, la femme m'a séduite!
Mémorable rencontre.
Rédigé par : Edith | 21 mars 2006 à 13:28
Merci, Edith, pour ce beau témoignage. Il va dans le sens de tout ce que j'ai entendu dire jusqu'ici sur cette grande dame. Elle fait partie de ces rencontres que l'on se plait à imaginer de faire un jour. Je n'ai jamais croisé Andrée Chedid, même dans le village de Centuri, dans le Cap Corse, où elle venait l'été, il n'y a pas si longtemps encore.
Ma fille aînée, elle, a rencontré Matthieu (M pour les aficionados), un soir à la marine de Canelle (une des marines du village). Ensemble ils ont improvisé un mini-concert a cappella, sous les étoiles, avec le bruit des vagues en contrepoint. Un enchantement, paraît-il (je n'y étais pas), qui est resté gravé dans les mémoires.
Rédigé par : Angèle | 22 mars 2006 à 23:20