Yves, l'éditeur-webmestre de TdF, vient de me transmettre ce papier. Je vous le livre tel.
D.R. Ph.Magnum Photos Do not use for advertising purposes
Au hasard d’une promenade sur la Toile, en ce mois de décembre 2005, j’ai croisé une photo « anonyme » d’un « po(e)te » affublé du surnom de « Giaco » (« et un Ricard, un »). Dont on se demande un court instant si ce n'est pas un des surnoms du perroquet Ver-Vert (ou Vert-Vert), le perroquet des Visitandines de Nevers. Au demeurant « un bel animal, fort distingué, élégant et racé [...] réputé pour son éducation », comme le souligne l'Amiénois Gresset. Autant le dire tout de suite, cette photo anonyme n’est rien moins qu’une des photos les plus emblématiques d’un des plus grands seigneurs de la photographie, le maître de « l’instant décisif » et l'un des fondateurs de l'agence Magnum : Henri Cartier-Bresson (1908-2004). Elle a pour nom : Giacometti rue d'Alésia. Une photo célèbre, prise un jour de tornade en 1961 (cinq ans avant la mort de Giacometti), dans le XIVe arrondissement, au carrefour de la rue de la Tombe-Issoire et de la rue d’Alésia. Oui, je connais bien, c'est un de mes anciens fiefs. Au début de cette année 2005, cette photo fut au nombre des photos fétiches présentées au public, à la Fondation Henri Cartier-Bresson, dans le cadre de l’exposition « Alberto Giacometti/Henri Cartier-Bresson : une communauté de regards ». Comme le remarque le blog paris14.info (le blog des habitants du 14e arrondissement de Paris), « le hasard a voulu qu’aujourd’hui, la Fondation Henri Cartier-Bresson se situe dans un atelier d’artiste [impasse Lebouis *] du XIVe arrondissement de Paris, à deux pas des ateliers où Alberto Giacometti œuvrait jadis... », c’est-à-dire au 46 de la rue Hippolyte-Maindron (vous ne pouvez pas vous tromper, le nom est peint sur la porte). Ce même blog parisien rapporte qu’« Alberto Giacometti et Henri Cartier-Bresson s’étaient rencontrés à Paris dans les années 1930 » et que « de cette rencontre est née une relation toute particulière qu’Henri a décrite en ces mots » : « Giacometti est un des hommes les plus intelligents que je connaisse, d’une honnêteté sur lui-même et sévère sur son travail, s’acharnant là où il éprouve le plus de difficultés. A Paris il se lève vers trois heures, va au café du coin, travaille, vadrouille à Montparnasse et se couche au jour. […] Son visage a l’air d’une sculpture qui ne serait pas de lui, sauf les sillons des rides. La démarche très personnelle, un talon se pose très avant, peut-être a-t-il eu un accident, je ne sais pas, mais la démarche de sa pensée est encore plus curieuse, sa réponse va bien au-delà de ce que vous avez dit : il a tiré un trait, additionne et ouvre une autre équation. Quelle vivacité d’esprit, le moins conventionnel et le plus honnête qui soit. […] Chez Alberto l’intellect est un instrument au service de la sensibilité. Dans certains domaines sa sensibilité prend de curieuses formes, par exemple méfiance de tout laisser-aller affectif avec les gens [c’est moi qui souligne]. Enfin cela ne regarde pas les lecteurs de Queen, pas plus que des descriptions d’Alberto prenant son café au lait au lit. Suffit, c’est mon ami. » Ces propos ont été publiés dans le journal The Queen du 1er mai 1962. Yves Thomas
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ALBERTO GIACOMETTI ■ Alberto Giacometti sur Terres de femmes ▼ → L’Atelier d’Alberto Giacometti (chronique d’Angèle Paoli) → 28 juillet 1964 | Inauguration de la Fondation Maeght de Saint-Paul de Vence (+ avant-propos du catalogue de l'exposition Giacometti à la Fondation Maeght en 2010) → 11 janvier 1966 | Mort d'Alberto Giacometti ■ Voir aussi ▼ → (sur cuk.ch ) « Alberto Giacometti, un Suisse pas comme les autres », par Anne Cuneo |
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