Si nous ne dormons pas
c'est pour guetter l'aurore
Ph., G.AdC
DEMAIN
« Agé de cent mille ans, j'aurais encor la force
De t'attendre, ô demain pressenti par l'espoir.
Le temps, vieillard souffrant de multiples entorses,
Peut gémir: Le matin est neuf, neuf est le soir.
Mais depuis trop de mois nous vivons à la veille,
Nous veillons, nous gardons la lumière et le feu,
Nous parlons à voix basse et nous tendons l'oreille
À maint bruit vite éteint et perdu comme au jeu.
Or, du fond de la nuit, nous témoignons encore
De la splendeur du jour et de tous ses présents.
Si nous ne dormons pas c'est pour guetter l'aurore
Qui prouvera qu'enfin nous vivons au présent. »
1942
Robert Desnos, Demain, État de veille [1943], in Destinée arbitraire, Gallimard, collection Poésie, 1975, pp. 182-183.
En fouinant sur le Web, j'ai fait mon marché et j'ai retrouvé la trace de quelques-unes des critiques musicales de Robert Desnos pour le journal Aujourd'hui, le journal d'Henri Jeanson et Robert Perrier paru sous l'Occupation de 1940 à 1944. Dont cette contribution, en date du 4 avril 1942 (à peu près l'époque où Desnos écrivit le poème Demain : ci-dessus), contribution que j'ai piochée sur un site Desnos :
« Enfin, Damia nous propose deux faces: Tourbillons d'amour et La Rue de notre amour, où nous la retrouvons émouvante, grave et ne cédant pas aux caprices d'une actualité souvent mal comprise. Au fait, ne serait-il pas possible de rééditer certains de ses merveilleux succès, de la Veuve aux Ménétriers, de la Mauvaise prière aux Goélands, de la Chanson du fou à la Guinguette a fermé ses volets ? Il est dommage que cette voix ne puisse plus se faire entendre dans tout son répertoire. »
Suit un fichier mp3 pour écoute.
N'allez pas pour autant imaginer que les paroles de cette chanson (Rue de notre amour) un peu fluette sont de la main de Desnos. Leur auteur en est Maurice Vandair. Le hasard a voulu qu'avant même d'avoir découvert ce site, j'aie mis cette chanson "d'ambiance" dans mon post-it du jour comme sélection des chansons que l'on pouvait entendre en 1942, l'année de Casablanca, l'année également où Desnos s'est remis à l'écriture poétique et l'année de publication du recueil Fortunes.
Magie d'Internet, avis aux maisons de disques qui souhaiteraient relancer le répertoire de Damia et merci à ce site Desnos (en cours de construction) qui remplace à point nommé l'ancien site de l'Association des Amis de Robert Desnos, site qui s'est quelque temps volatilisé, et qui est en reconstruction.
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NOTE : l'ensemble (depuis les années 1920) des critiques de disques de Robert Desnos a été publié en 1987 sous le titre Les Voix Intérieures aux Éditions du Petit Véhicule et réédité par les éditions L'Arganier (2 septembre 2005). La citation ci-dessus en est extraite.
Découverte guidée de Robert Desnos, merci Angèle.
Ce poème de Marc Baron comme une réponse à celui de Robert Desnos, ou mieux qu’une réponse, un prolongement, un chemin commun.
Je l’ai trouvé à la page 128 de son recueil Les Amants du fragile dans la suite qu’il appelle « Le silence et la lampe », poèmes édités chez L’Harmattan
Nocturne
Chaque matin la vie avance d’un cran
Et de quelques désirs
C’est une loi immuable
Au lever du soleil
On rêve déjà d’une lumière infinie
Mais on l’oublie dans la tourmente
Et moi je me console encore
En écrivant sous la lampe
Tant qu’il y aura du silence, Dieu merci
Je penserais au mouvement perpétuel
Qui endort et réveille le monde
A cette lumière inconnue des parleurs et des physiciens
Et qui me tient librement levé dans la nuit
Rédigé par : Edith | 27 novembre 2005 à 10:54
Merci, Edith. C'est superbe, comme j'ai eu l'occasion de te le dire en privé. Et si tu nous en disais un peu plus sur Marc Baron ?
Amitiés,
Angèle
Rédigé par : Angèle | 28 novembre 2005 à 12:42