Le
21 novembre 1975 a lieu la première de
Partage de Midi de
Paul Claudel au théâtre Marigny. Dans une mise en scène d’
Antoine Vitez, qui fait de cette reprise une première « historique » (entrée au répertoire de la Comédie-Française). Décors et costumes ont été confiés à Yannis Kokkos.
Ludmila Mikaël interprète le rôle de Ysé, Patrice Kerbrat celui de Mesa. Michel Aumont interprète Amalric et Jérôme Deschamps le rôle de De Ciz.
La pièce de Claudel avait été créée pour la première fois le
16 décembre 1948, au même théâtre Marigny, dans une mise en scène de Jean-Louis Barrault. Jean-Louis Barrault interprétant le rôle de Mesa, Edwige Feuillère celui d’Ysé, Pierre Brasseur celui d’Amalric et Jacques Dacqmine le rôle de De Ciz.
Antoine Vitez et Ludmila Mikaël
au cours d’une répétition du Partage de midi (1975)
Ph. © Claude Angelini
Source
Drame en trois actes, Partage de Midi (1906) est un quatuor. Issu d’une crise passionnelle des années « méridiennes » de la vie de Paul Claudel. « Rien de plus banal en apparence que le double thème sur lequel est édifié le drame », écrit Claudel dans la Préface de Partage de Midi. « Le premier, celui de l’adultère : la mari, la femme et l’amant. Le second, celui de la lutte entre la vocation religieuse et l’appel de la chair. Rien de plus banal, mais aussi rien de plus antique. » Pourtant, selon François Mauriac, Claudel a introduit dans ce qui aurait pu devenir un « vaudeville sinistre » un autre personnage. Au centre même de Partage de Midi, « une présence plus agissante que le Destin dans la tragédie grecque, transforme ce drame de la chair en drame de la grâce ».
Sur un paquebot en route vers la Chine, perdus en plein Océan indien quatre Européens affrontent le soleil de midi : la belle et mystérieuse Ysé, épouse de De Ciz, Amalric, un aventurier qui « déteste les faibles », et le solitaire Mesa, commissaire des douanes, qui a manqué sa vocation religieuse. Entre Ysé et Mesa naît une fascination irrésistible à laquelle le pâle de Ciz finit par consentir. Mais alors que Mesa croit enfin pouvoir accueillir l’amour total auquel il aspire, Ysé demeure inaccessible.
Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli
Plateforme pour un théâtre
Collection Maison Antoine-Vitez
EXTRAIT
Ysé.― Il ne m’aime pas !
Il m’aime à sa manière. Il n’aime que lui. Je me souviens de notre nuit de noces.
Et tous ces enfants que j’ai eus coup sur coup ! Car il y en a un que j’ai perdu.
Les fuites, les criantes, les aventures ! Tant d’années de ma jeunesse que voilà passées !
Amalric.― Et cependant Ysé, Ysé, Ysé,
Cette grande matinée éclatante quand nous nous sommes rencontrés ! Ysé, ce froid dimanche éclatant, à dix heures sur la mer !
Quel vent féroce il faisait dans le grand soleil !
Comme cela sifflait et cinglait, et comme le dur mistral hersait l’eau cassée,
Toute la mer levée sur elle-même, tapante, claquante, ruante dans le soleil, détalant dans la tempête !
C’est hier sous le clair de lune, dans le plus profond de la nuit
Qu’enfin, engagés dans le détroit de Sicile, ceux qui se réveillaient se redressant, effaçant la vapeur sur le hublot,
Avaient retrouvé l’Europe, tout enveloppée de neige, grande et grise,
Sans voix, sans figure, les accueillant dans le sommeil.
Et ce clair jour de l’Épiphanie, nous laissions à notre droite derrière nous,
La Corse, toute blanche, toute radieuse, comme une mariée dans la matinée carillonnante !
Ysé, vous reveniez d’Egypte, et moi, je ressortais du bout du monde, du fond de la mer…
Paul Claudel, Partage de Midi [1re version], Théâtre, I, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1964, page 995.
Ph, G.AdC
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NOTE d’AP : Antoine Vitez est l’auteur de la mise en scène « mythique » du Soulier de satin de Paul Claudel, joué en 1980 dans sa version intégrale au théâtre d’Orsay, puis repris en 1987 au XIIe Festival d’Avignon, dans la cour d’honneur du Palais des Papes. Avec à nouveau Ludmila Mikaël, mais aussi Robin Renucci.
Chère Madame, Cher Monsieur,
Veuillez me permettre de vous présenter la question suivante :
Dans un roman de l'auteur estimé nérlandais Jan Siebelink, écrivain récemment primé aux Pays-Bas (prix littéraire national AKO), on trouve comme devise une phrase, empruntée à Partage de Midi de Paul Claudel. Le texte de la devise est:
"Tu n'es pas le bonheur
Tu es cela qui est à la place du bonheur".
Je voudrais vous demander où est-ce qu'on peut trouver ce texte-ci sur internet ?
Agréez, Madame, Monsieur, mes remerciements anticipés,
Léo Meijers, domicilié à Assen, NL9402 SC/28, Pays-Bas.
Rédigé par : Léo Meijers | 28 novembre 2005 à 22:50
Bonjour Léo,
Cette phrase de Claudel n'est pas, à mon sens, sur Internet. Elle y sera désormais.
Mesa parle :
"Et qui te dis que tu es le bonheur ? ah, tu n'es pas le bonheur ! tu es cela qui est à la place du bonheur !"
Vous trouverez cette citation dans l'Acte II de Partage de midi (Claudel, Partage de midi [Ire version], Poésie, I, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, pp. 1027-1028).
Très cordialement,
Angèle
Rédigé par : Angèle | 29 novembre 2005 à 09:53