«
À travailler tordu j’ai attrapé un goitre/ comme l’eau en procure aux chats de Lombardie […] et j’ai le ventre, à force collé au menton./ Ma barbe pointe au ciel, je sens ma nuque /sur mon dos, j’ai une pointe de harpie », a écrit l’artiste [Michel-Ange] fourbu et en révolte dans un sonnet composé après avoir peint les fresques du plafond de la Sixtine. »
Sylvie Germain, Les Personnages, Gallimard, Collection « L’Un et L’Autre », 2004, page 67.
Source
I’HO GIÀ FATTO UN GOZZO
« I’ ho già fatto un gozzo in questo stento,
Come fa l’acqua a’ gatti in Lombardia
O ver d’altro paese che si sia,
C’a forza ’l ventro appiccasotto ’l mento.
La barba al cielo, e la memoria sento
In sullo scrigno, e ’l petto fo d’arpia,
E ’l pennel sopra ’l viso tuttavia
Mel fa, gocciando, un ricco pavimento.
E’ lombi entrati mi son nella peccia,
E fo del cul per contrapeso groppa,
E’ passi senza gli occhi muovo invano.
Dinanzi mi s’allunga la corteccia,
E per piegarsi adietro si ragroppa,
E tendomi com’arco sorïano.
Però fallace e strano
Surge il iudizio che la mente porta,
Ché mal si tra’ per cerbottana torta.
La mia pittura morta
Difendi orma’, Giovanni, e ’l mio onore,
Non sendo in loco bon, né io pittore. »
À TRAVAILLER TORDU
« À travailler tordu j’ai attrapé un goitre
Comme l’eau en procure aux chats de Lombardie
(À moins que ce ne soit de quelque autre pays)
Et j’ai le ventre, à force, collé au menton.
Ma barbe pointe vers le ciel, je sens ma nuque
Sur mon dos, j’ai une poitrine de harpie,
Et la peinture qui dégouline sans cesse
Sur mon visage en fait un riche pavement.
Mes lombes sont allées se fourrer dans ma panse,
Faisant par contrepoids de mon cul une croupe
Chevaline et je déambule à l’aveuglette.
J’ai par devant l’écorce qui va s’allongeant
Alors que par derrière elle se ratatine
Et je suis recourbé comme un arc de Syrie.
Enfin les jugements que porte mon esprit
Me viennent fallacieux et gauchis : quand on use
D’une sarbacane tordue, on tire mal.
Cette charogne de peinture,
Défends-la, Giovanni, et défends mon honneur :
Suis-je en bonne posture ici et suis-je peintre ? »
Michelangelo Buonarroti, Rime, in Anthologie de la poésie italienne, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1994, pp. 498-499.
En cliquant ICI, vous pouvez accéder au manuscrit autographe de ce Sonetto (retranscription de Enzo Noè Girardi, base de données du “NUOVO RINASCIMENTO”, FACOLTÀ DI LETTERE E FILOSOFIA DELL'UNIVERSITÀ DI FIRENZE), qui, comme on peut le constater, présente des écarts par rapport à la « forme fixe » du sonnet (quatorze vers répartis en deux quatrains et deux tercets).
MICHELANGELO /MICHELANGELA _______
Voici pour vous deux :
… Dans les brillances de l'éphéméride
Jaillissent les secrets notoires des paroles grenades .
Les sourires colportent sans vergogne l'infinitif,
Garants d'une trajectoire en bonne intelligence avec le verbe,
Ils rejettent l'implacable, concédant au réel un trop-plein de complaisance.
De ce corps à corps avec les pourfendeurs de mythes
Surgira très bientôt un goût de l'immortel.
Inscrites pour toujours, les fêlures au plafond
De ce palais dodécaèdre,
Sculptent des édifices abstraction .
En regardant se dédoubler les mécanismes et
Sans pour autant gommer la cicatrice
Je veux parvenir à donner forme à la déraison…
Amicizia
Guidu
Rédigé par : Guidu | 04 novembre 2005 à 11:44