Le 12 octobre 1931, à Montréal, Serge Rachmaninov interprète pour la première fois au piano les Variations sur un thème de Corelli, qu'il a achevé de composer le 19 juin 1931 dans sa propriété de Clairefontaine (près de Paris). Ces variations reprennent le thème de la Follia de Corelli.
Le Concert dans l'oeuf
début du XVIe siècle,
copie d'après une toile perdue de Jérôme Bosch
Huile sur toile,
Lille, Musée des Beaux-Arts
Que soit prononcé le mot Folia et surgissent dans l’imaginaire collectif des réjouissances villageoises débridées. Par son étymologie et ses manifestations, la Folia s’apparente en effet à la folie. Originaire du Portugal, la Folia et ses différents dérivés foliada, folijones, foliόn désignent une danse animée et bruyante très répandue à partir du XVe siècle. Sur un schéma de basse obstinée à 3/4, proche de la chaconne ou de la passacaille. Peut-être liée à de lointaines cérémonies rituelles de fécondation, la Folia était sans doute un moyen d’exorciser les peurs qu’inspiraient les manifestations dérangeantes des fous.
La Folia médiévale, aux martèlements saccadés, fait intervenir de nombreux danseurs. Certains, bizarrement travestis, sont hissés sur les épaules de leurs compères. Transformant en géants les corps grotesquement agencés. Nombreux sont les textes, traités de musique et de chorégraphie, qui attestent l’existence de ces danses théâtralisées. Nombreux aussi et fort savants, les écrivains et dramaturges qui s’en inspirent : Gil Vincente, Lope de Vega, Tirso de Molina…
Au XVIIe siècle, Corelli s’empare du thème de la Folia pour la Douzième Sonate de son opus 5. Sous l’impulsion du compositeur italien, cette Folia devient Follia. Folies d’Espagne pour les compositeurs français. Même si ces Folies ont quitté la terre ibérique. Dans l’Europe musicale baroque, elles font fureur. Du compositeur vénitien Antonio Vivaldi (Sonate en trio en ré mineur, opus 1 n° 12, RV 63) à Girolamo Frescobaldi, Francesco Geminiani, Marin Marais, Alessandro Scarlatti ou Carl Philippe Emmanuel Bach. Pourtant elles ont perdu en chemin un peu de leur folie originelle et se sont assagies. Objets de variations instrumentales, elles continueront d’inspirer de nombreux compositeurs au cours des siècles suivants : Cherubini, Franz Liszt, puis, au XXe siècle, le compositeur russe Serge Rachmaninov.
Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli
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An extensive discography of Rachmaninoffs interpretation of the Folia theme you can find at the Folia page (deeplink).
Rédigé par : Paul Gabler | 26 février 2006 à 11:11